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ou huit vers, exprime une pensée tendre, galante ou gracieuse, dont l'amour et la beauté doivent toujours être l'objet.

D'après cette définition, la plupart des pièces détachées dont se compose l'anthologie grecque, ne seraient que des madrigaux, si presque toujours la pensée, le sentiment ne s'y trouvait exprimé sous une forme subtile, qui a permis de les confondre avec l'épigramme.

Parmi nous,

Le madrigal, plus simple et plus noble en son tour,
Respire la douceur, la tendresse et l'amour.

Nos poëtes des seizième et dix-septième siècles étaient fertiles en madrigaux, mais avant eux les Italiens et les Espagnols avaient déja cultivé avec succès cette branche de la poésie légère ; c'est sur-tout en France qu'une heureuse imagination, servie par l'élégante urbanité des mœurs, s'est plu à multiplier ces opuscules poétiques.

Les satires de Boileau n'ont pas empêché que ce joli madrigal de l'abbé Cotin n'arrivât jusqu'à nous.

Iris s'est rendue à ma foi;

Qu'eût-t-elle fait pour sa défense?

Nous n'étions que nous trois, elle, l'Amour et moi,

Et l'Amour fut d'intelligence.

On sait que le madrigal suivant, adressé à la duchesse du Maine, ouvrit à Saint-Aulaire les portes de l'académie.

La divinité qui s'amuse

A me demander mon secret,

Si j'étais Apollon, ne serait pas ma muse;
Elle serait Thétis, et le jour finirait.

Mais quelque ingénieux qu'il soit, je préfère à ce ma

drigal celui de Bertaut, où je trouve l'expression plus naïve d'un sentiment plus vrai.

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Voltaire, qui le premier, je crois, a parlé de ce madrigal, au mot Esprit, dans son dictionnaire philosophique, n'a pas dit qu'il l'eût extrait d'une fort longue pièce de vers, dont il forme la première et la seule bonne stance. Voltaire met ce madrigal au-dessus de celui de M. de La Sablière:

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L'Hymen, plus puissant que l'Amour,

N'enlève ses trésors sans qu'elle ose s'en plaindre;

Elle a négligé mes avis;

Si la belle les eût suivis,

Elle n'aurait plus rien à craindre,

et de celui-ci, qu'il offre également pour modèle:

Vous êtes belle, et votre sœur est belle;
Entre vous deux tout choix seroit bien doux.

L'Amour était blond comme vous;

Mais il aimait une brune comme elle.

Toutes les concessions de supériorité que Voltaire fait à ses rivaux, il les détruit par ses propres ouvrages. Il porta dans ce genre de poésies fugitives la même perfection qui signalait les moindres jeux de sa plume. Quel madrigal peut se comparer à celui qu'il adresse à la princesse Ulrique de Prusse, depuis reine de Prusse?

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Je vous aimais, princesse, et j'osais vous le dire:
Les dieux à mon réveil ne m'ont point tout ôté ;

Je n'ai perdu que mon empire.

Il est inutile d'insister sur la grace, le charme, et la tournure ingénieuse de cette petite pièce de vers, dont on pourrait dire avec plus de raison que Boileau ne l'a dit du sonnet;

Un PAREIL MADRIGAL vaut seul un long poëme.

Je pourrais citer cent autres madrigaux du même poëte, sinon d'un mérite égal à celui-ci, du moins très supérieurs à ce que l'on connaît dans ce genre: je me borne à ce portrait de madame la duchesse de La Vallière :

Être femme sans jalousie,

Et belle sans coquetterie,

Bien juger sans beaucoup savoir,

Et bien parler sans le vouloir;
N'être haute ni familière,

N'avoir point d'inégalité;
C'est le portrait de La Vallière,

Il n'est ni fini ni flatté.

L'ÉPIGRAMME.

L'auteur qui a le mieux réussi dans ce genre, Le Brun, a cherché à le justifier dans ce quatrain:

Sachez, lecteurs, que les méchants

Font les vers noirs, les noires trames :

Ce ne sont que les bonnes gens

Qui font les bonnes épigrammes.

Pour ramener quelqu'un à cet avis donné en vers assez

POÉSIES LÉGÈRES.

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médiocres, il faudrait du moins qu'on pût ignorer que les trois poëtes qui ont excellé dans l'épigramme, Pope, JeanBaptiste Rousseau, et Le Brun lui-même, ont laissé une réputation de méchanceté, avouée de leurs plus grands ad

mirateurs.

Les anciens nommaient indifféremment Épigramme une saillie maligne, ingénieuse ou galante, ou même une simple inscription: epi gramma, chose écrite sur....

Les modernes ont restreint la signification de ce mot : ce n'est plus qu'un trait malin, rédigé en vers, et avec toute la précision possible.

Notre littérature est plus riche en épigrammes que celle de toutes les autres nations réunies.

Celle-ci, de Marot, a le mérite bien rare d'être dirigée contre un homme injuste et puissant: cette noble vengeance du génie est un trait bien honorable dans la vie du plus ancien de nos poëtes.

Lorsque Maillard, juge d'enfer, menait
A Montfaucon Semblançay l'ame rendre,
A votre avis, lequel des deux tenait

Meilleur maintien? Pour vous le faire entendre,
Maillard semblait l'homme que mort va prendre,

Et Semblançay fut si ferme vieillard,

Que l'on cuidait pour vrai qu'il menât pendre

A Montfaucon le lieutenant Maillard.

Racine a excellé dans l'épigramme, mais il n'en a composé qu'un très petit nombre; il est vrai que ce sont des coups de maître. Je choisis les deux suivantes :

Sur le Germanicus de Pradon.

Que je plains le destin du grand Germanicus!

Quel fut le prix de ses rares vertus !

Persécuté par

le cruel Tibère,

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Le vraisemblable est peu dans cette pièce,

Si l'on en croit et d'Olonne et Créqui :

Créqui dit que Pyrrhus aime trop sa maîtresse,

D'Olonne qu'Andromaque aime trop son mari.

Voltaire a plus cruellement immolé Desfontaines dans l'épigramme suivante :

Certain caffard, jadis jésuite,

Plat écrivain, depuis deux jours
Ose gloser sur ma conduite,
Sur mes vers et sur mes amours.

En bon chrétien je lui fais grace.

Chaque pédant peut critiquer mes vers;
Mais sur l'amour jamais un fils d'Ignace

Ne glosera que de travers.

Ce même abbé Desfontaines a fourni à Piron le sujet de sa meilleure épigramme :

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Trois poëtes du dix-huitième siècle, Rousseau, Piron, et Le Brun, s'y disputaient depuis long-temps une supériorité que je crois définitivement acquise à ce dernier, si l'on éloigne, comme je le fais, Racine et Voltaire du concours. Ce dernier a semé ses ouvrages de vers épigrammatiques

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