Billeder på siden
PDF
ePub

de temps avant de mourir, il passa en Grèce pour y mettre la dernière main. Depuis long - temps il étoit d'une santé foible: le changement d'air et la fatigue du voyage redoublèrent ses infirmités. Octave, revenant d'Asie et passant par Athènes, l'engagea à retourner avec lui en Italie. Mais à peine fut-il arrivé à Brindes, qu'il y mourut, âgé de cinquante

un ans.

Son poëme, tout imparfait qu'il nous l'a laissé, a toujours été regardé comme une des plus belles productions du génie, et partage avec l'Iliade l'admiration de tous les gens de goût. Il en étoit néanmoins si peu content lui-même, que, quand il se sentit près de mourir, il voulut le mettre au feu comme une ébauche informe. Ses amis, Auguste lui-même, s'intéressèrent à la conservation d'un si bel ouvrage. Il céda à leurs instances, et chargea, par son testament, Tucca et Varius de le revoir, d'en retrancher ce qui ne seroit pas digne de lui, mais sans y rien changer et sans y rien ajouter.

[blocks in formation]

IDÉE

DE LA POÉSIE PASTORALE.

La poésie pastorale est celle qui emprunte ses fictions, ainsi que ses expressions et ses images, de la vie champêtre et des mœurs simples et ingénues des anciens pasteurs.

Les fictions, dans la poésie pastorale, sont ordinairement allégoriques, et peuvent offrir, sous le voile d'une apparente naïveté, les vérités les plus graves et les objets les plus.

sérieux.

La simplicité pastorale dont il s'agit n'est pas une rusticité grossière, ni une ignorance crasse et stupide; elle suppose dans les personnages que l'on introduit comme bergers le bon sens naturel, accompagné de plus ou moins de connoissances proportionnées à leur situation.

Le cercle de ces connoissances n'est point borné strictement à ce qui regarde le soin des troupeaux, l'agriculture et les autres occupations de la campagne : le loisir dont jouissent ces bergers leur permet non seu

lement de fredonner des airs et de composer des chansons, mais même de réfléchir et de raisonner entre eux, ne fût-ce que sur les merveilles de la nature qu'ils ont continuellement sous les yeux.

Sans sortir de la sphère de leur condition, ils peuvent avoir des idées plus ou moins précises sur le gouvernement, sur l'histoire, sur la religion des temps et des pays où on les fait vivre. Ce ne sont point des savants, des politiques, ni des philosophes: ils ont cependant ouï parler des sciences, de philosophie, de révolutions dans les états; mais lorsqu'ils en parlent à leur tour, soit dans leurs chansons, soit dans leurs entretiens, c'est toujours d'une manière un peu vague, et souvent avec l'étonnement qu'excite une chose extraordinaire, ou cette admiration que l'on a pour tout ce qui paroît merveilleux et au dessus de l'intelligence commune. Ils ajoutent ordinairement beaucoup de foi aux traditions vulgaires, aux présages et aux autres préjugés populaires.

Comme la poésie pastorale est censée remonter aux temps fabuleux, le langage mythologique s'y est maintenu aussi bien que dans les autres genres de poésie; mais les divinités des bergers sont principalement celles de la campagne: Flore, Pomone, les Faunes, les Sylvains, les Nymphes, et Pan sur-tout, Dieu de l'Arcadie, chef-lieu pour ainsi dire de l'empire pastoral. Les bergers ont de l'esprit, sans chercher à le montrer; ils ont des malices, et jamais de méchanceté ni de noirceur; ils ont des passions, telles que l'amour, la jalousie, etc.; mais ces passions, prises dans la nature, sont intéressantes sans avoir rien d'exagéré, ni de tragique, ni même de vraiment comique. Tel est le caractère de la poésie pastorale, parfaitement tracé par l'auteur de l'Art Poétique français au commencement du second chant.

Ce morceau, bien entendu, suffiroit seul pour fixer nos jugements sur les ouvrages de ce genre, et en particulier sur les Bucoliques de Virgile.

En prenant la bergère pour objet de comparaison, l'auteur ne nous l'offre pas dans un négligé sale, ni dans des occupations dégoûtantes; mais, au contraire, dans son costume le plus propre et le plus gracieux, celui des plus beaux jours de fête : ce qui déjà indique suffisamment la pureté et l'élégance du style qui convient à l'églogue. Il

« ForrigeFortsæt »