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clára qu'il pardonnait à cette ville, en considération de son fondateur et de l'amitié qu'il avait pour Aréus. Insensible à la douleur de Cléopâtre, qui faisait mine de vouloir se tuer, et aux agaceries par lesquelles elle cherchait à le séduire, son seul désir fut de lui conserver la vie pour qu'elle ornât son triomphe; mais l'horrible idée d'être livrée en spectacle comme un objet de pitié dans une ville où elle avait excité l'envie, la détermina à se faire piquer par un aspic. Ce fut ainsi qu'elle sut échapper à celui que n'avaient pu vaincre ses charmes.

Avec elle finit la race des Lagides, qui avait duré deux cent quatre-vingt-quatorze années. On raconte que, la veille de la défaite d'Antoine sous Alexandrie, une harmonie de mille instruments, mêlée de voix en grand nombre, troubla le silence de la nuit. Tout le monde pensa que c'était Bacchus Osiris qui abandonnait son ancien séjour pour passer dans le camp d'Octave. En effet, la société orientale, qui avait soutenu la lutte contre l'Occident, finissait. Désormais le culte de la nature, les conquêtes sanglantes et l'ivresse des sens devaient céder la place à d'autres maximes et à d'autres gloires, révélation d'un autre monde (1). Nous avons vu cette Égypte, qui se montra si grande aux commencements de l'histoire, ouvrir ses temples à d'autres divinités, ses frontières à d'autres peuples, et elle-même subir la servitude contre laquelle elle ne s'était prémunie que par l'isolement. La domination des Ptolémées parut lui avoir donné une nouvelle vie. L'Égypte acquit sous eux une opulence prodigieuse, grâce à l'admirable situation d'Alexandrie, devenue le centre du commerce du monde, et qu'enrichit de plus en plus le luxe toujours croissant des Romains. Les fréquentes révolutions qui l'atteignirent ne lui causèrent pas beaucoup de maux, attendu que la capitale en était le plus souvent le théâtre, et que le pays suivait son impulsion sans en éprouver une grande perturbation. Le peuple, qui d'abord avait horreur de la mer, finit par devoir sa prospérité à la navigation, et par tenir, à Actium, la balance entre l'Orient et l'Occident. Peut-être même, sans le caprice insensé de Cléopâtre, eût-il donné la victoire à Antoine. Ce qui prouve que ce pays ne dut sa splendeur qu'au commerce, c'est l'accroissement prodigieux d'Alexandrie lorsque cette ville fut tombée sous la domination romaine, et lorsque le nom de l'Égypte cessa, durant plusieurs siècles, d'être mentionné par l'histoire.

(1) MICHELET, Hist. romaine, t. II, ad fin.

CHAPITRE XXI.

AUGUSTE.

Incapable de faire une révolution, mais très-habile à pr de celles qui avaient été faites, Auguste, après avoir rég affaires de l'Asie et des îles, revint à Rome, où il se fit déc un triple triomphe : le premier, pour ses victoires sur la Dalm le second, pour la bataille d'Actium ; le troisième, pour la mission de l'Egypte. On lui décréta le titre d'Imperator, plus comme simple dénomination honorifique, mais comme d'autorité et pour indiquer en quelque sorte, suivant l'expre de Dion, une puissance presque divine (1); il fut salué du d'Auguste, sous lequel l'histoire le désigne ; et le mois sex dans lequel il triompha, reçut celui d'augustus (2).

(1) Ὡς και πλεῖον τί, ἢ κατὰ ἄνθρωπος ὤν. DION, LIII. Mais que sig nom d'Auguste? Festus le fait délivrer de avium gesta ou de avium gr étymologie bien forcée. D'autres le tirent d'augurium; ceux-ci, de splendeur; ceux-là, d'augeo, dans le sens de consacrer la victime: A aurait dans ce sens la valeur de Consacré. Ce qui fait dire à Ovide (Fastes, Sancta vocant augusta patres ; augusta vocantur Templa, sacerdotum rite dicata manu. Hujus et augurium dependet origine verbi,

Et quodcumque sua Juppiter auget ope.

La plupart le font venir d'augere, dans le sens d'augmenter; c'est po que nous trouvons dans une inscription lapidaire en l'honneur de Julie que dans les panégyriques de Maximien et de Constantin, les mots augustus, qui ont été adoptés par les empereurs d'Allemagne, et trad Mehrer des Reichs, c'est-à-dire, augmentant toujours l'empire.

(2) Macrobe nous a conservé dans les Saturnales, I, 12, le sénatus-c qui changea le nom de sextilis en celui d'augustus :

aux testaments, tandis qu'il s'appropriait ce qu'il y avai solide et de plus réel. Les soldats eux-mêmes se prirent à contre leur habitude, quoique lâche et peureux; peut-ê qu'ils sentaient combien ils lui étaient nécessaires, et pa l'avaient pris en quelque sorte sous leur protection.

La querelle entre les patriciens et les plébéiens s'étai après l'institution du tribunat, et plus ouvertement aprè tatives démocratiques des Gracques. La mort des deux un triomphe pour l'aristocratie: Marius venge le peup rend le pouvoir à la noblesse; Sertorius, Lépidus, Catili quent de nouveau, mais elle est abattue à Pharsale på La faveur que le sénat accorde aux meurtriers du dict le dernier souffle de l'aristocratie, qui expire à Phili l'infatigable démocratie, parvenue au terme de ses travaille alors à affermir le despotisme d'un seul. Il gissait pas, dans la dernière guerre, du triomphe d'u mais de savoir à quel chef obéirait la démocratie victorie guste, qui l'emporta, reçut l'autorité du peuple, dont sentait les droits, et de l'armée, qui faisait sa force. I se trouva dès lors fondée sur les deux bases les plus s despotisme.

Toutes les révolutions antérieures s'étaient accompli armes, et en foulant aux pieds la justice et les lois; elles donc été rapides, et une seule bataille en avait décidé Crassus, Pompée, César, avaient habitué les soldats à

CUM IMPERATOR CÆSAR AUGUSTUS MENSE SEXTILI ET PRIMUM CONSULAT ET TRIUMPHOS TRES IN URBEM INTULERIT, ET EX JANICULO legiones de CUTÆQUE SINT EJUS AUSPICIA AC FIDEM, SED ET ÆGYPTUS HOC MENSE IN F POPULI ROMANI REDACTA SIT FINISQUE HOC MENSE BELLIS CIVILIBUS IMP ATQUE OB HAS CAUSAS HIC MENSIS HUIC IMPERIO FELICISSIMUS SIT AC FU CERE SENATUI UT HIC MENSIS AUGUSTUS APPELLETUR.

tout dans la république, à agir malgré elle et contre elle. Crassus fit la guerre aux Parthes et César aux Gaulois, sans décret du sénat ni du peuple; Gabinius, en dépit d'un décret contraire, alla remettre Ptolémée sur le trône, et n'en demanda pas moins le triomphe. Les triumvirs avaient employé les forces de la république à combattre pour leur propre ambition. Le démagogue n'avait donc plus besoin de caresser la multitude, il lui suffisait de s'attacher des amis et des soldats. Or, ceux-ci ne visaient pas au triomphe d'une opinion ou d'une cause, mais à celui d'un homme, mais à des récompenses espérées. Un général prodigue de dons était leur dieu; manquait-il à ses promesses, ils se tournaient de l'autre côté. Vaincu, il était abandonné, car il ne pouvait plus assouvir leur avidité. On comprend que de pareilles gens ne voulaient ou ne pouvaient opposer aucun obstacle à Octave, qui, sachant que sa fortune était leur œuvre, était tout disposé à les récompenser. Les soldats de Lépidus et d'Antoine qui étaient venus à lui, non par affection, mais par cupidité, prétendaient aussi être rémunérés, et il leur distribua les terres des provinces domptées et de celles qui étaient restées paisibles. Comme cette distribution ne suffisait pas, il vendit son patrimoine, emprunta à ses amis, et contenta ces vétérans avides.

Le moment était on ne peut plus favorable pour quiconque voulait jouer le rôle de pacificateur. Rome se sentait affaiblie par cette lutte interminable. Les routes étaient infestées de bandes qui dépouillaient les voyageurs et les emmenaient esclaves. La ville même voyait des brigands la parcourir audacieusement. Les chevaliers étaient ruinés, la plèbe affamée, les lois outragées, l'Italie inculte, les provinces épuisées (1). Combien de temps y avait-il qu'aucun homme considérable n'avait fini naturellement ses jours! Chacun remettait un poignard à son affranchi, qui devait frapper à la première requête, ou portait sur soi un poison subtil. Qui pouvait être assuré du lendemain, compter sur ses champs, sur ses esclaves? Qui pouvait dire en sortant, entouré de

(1)

2

Quis non latino sanguine pinguior
Campus, sepulcris impia prælia
Testatur, auditumque Medis
Hesperia sonitum ruinæ ?

Qui gurges, aut quæ flumina lugubris
Ignara belli? Quod mare Dauniæ

Non decoloravere cædes ?

Quæ caret ora cruore nostro? HORAT., Od., II, 1.

:

d'impitoyables gouvernements militaires', d'atroces t Quand Brutus et Cassius désespéraient de leur cause de se tuer, qui pouvait avoir le courage de servir ce qu'ils avaient déclarée n'être qu'un songe? Il fallait connaître que l'ancienne liberté romaine était désorma sible, là où il ne restait plus qu'à choisir entre les tyra séduite par l'éclat de la victoire, la multitude, exclue d depuis un certain temps, n'avait rien à regretter. Les avaient des distributions et des spectacles, c'est-à-dire qu'ils désiraient les riches se voyaient enfin assurés de ce qu'ils possédaient. Les nobles trouvaient plus commo digne de s'élever en sollicitant un homme puissant qu guant au milieu d'une multitude inconstante; les provin gées de caresser le peuple et l'aristocratie, réduites à n qui adresser leurs députés et leurs plaintes, d'autant mo tées qu'elles étaient plus justes, entrevoyaient plus de de trouver un appui dans un pouvoir unique; elles espér l'asservissement de la métropole leur vaudrait le repos, nuant les dévastations légales et les ravages de la guerr

Auguste lui-même, parvenu au comble de ses espér cette plénitude de pouvoir où il n'y a pas moins de fér de folie à se venger de ses ennemis, jugea utile de d glaive après l'avoir si inhumainement abreuvé du sang Dans sa politique déliée, il reconnut qu'il était nécessai guiser la servitude; car la mort de César l'avertissait qu fait de gouverner, il ne devait pas prétendre à régner. avait promis, s'il était vainqueur, de rétablir la républi guste, victorieux, ne négligea rien pour persuader au p rien n'était changé quand il se rendait maître de tout combien il lui était profitable en définitive de modifier le fond. C'était ainsi qu'en flattant les idées du plus gra

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