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ses sujets qui ont encore des serfs dans leurs domaines, entrent dans les vues bienfaisantes et désintéressées du gouvernement : le roi leur offre son exemple et des facilités pour le suivre; il respecte d'ailleurs les droits de la propriété; il ne prescrit rien, mais jamais roi eut-il plus le droit de dire : Toutefois en ces lieux je ne connais personne

Qui ne doive imiter l'exemple que je donne.

Ici, qui pourrait s'empêcher de regréter que cet homme utile au monde, l'honneur des lettres dans le dix-huitième siècle, qui employa si souvent en faveur de l'humanité les droits et les ressources du génie, qui se chargea d'annoncer tant de vérités importantes, d'essuyer le premier feu des contradictions, et de préparer les voies à la raison, le défenseur des Calas, des Sirven et des serfs de Saint-Claude, n'ait pas assez vécu pour jouir avec nous de ce bienfait royal? que ses yeux, du moins en se fermant, n'aient pas vu cet accomplissement de ses vœux, ce fruit et ce prix de ses travaux? Il a pu dire au moins, comme le célèbre roi de Pont: J'ai vengé l'Univers autant que je l'ai pu : La mort dans ce projet m'a seule interrompu.

Pour nous, que ne pouvons-nous pas attendre d'un roi qui veut le bien, et d'un ministre qui sait le faire! Et quel terme devons-nous mettre à nos espérances? Nommer des abus, c'est peut-être en

obtenir la réforme. Ne dissimulons rien: il reste encore sur cette matière des contradictions qui affligent la raison. Des intérêts de commerce ne nous ont pas encore permis de regarder comme des hommes ces malheureux que notre avidité arrache au sein de l'Afrique pour les enchaîner au fond de l'Amérique, ou plutôt c'est nous qui ne pouvons pas nous vanter d'être des hommes à leur égard. Nous les faisons Chrétiens, et nous les rendons esclaves! En France même, dans cette heureuse patrie de la liberté, au sein du Christianisme qui affranchit tout, nous avons un Code noir, un code de servitude! Ce code (il n'est pas inutile de l'observer) est de 1685, année trop fameuse par les maux qu'a causés, au moins dans son exécution, l'édit qui a révoqué celui de Nantes. Le Code noir et les Dragonades attestent que cette époque n'était pas favorable en France à l'humanité. Un jour plus serein luit maintenant sur elle : tous les soupirs de la faiblesse souffrante ou opprimée sont entendus. En ce moment même une nouvelle loi de bienfaisance, perfectionnant l'administration des hôpitaux, ouvre aux malheureux de nouvelles sources de secours, et le peuple, plein de confiance dans un roi si juste et si bon, sent que, s'il existe encore des abus inhumains, c'est que le gouvernement ne peut pas tout faire à la fois.

RÉPONSE

DE M. GAILLARD, directeur de l'Académie française, au discours de réception de M. le duc d'Harcourt, élu à la place de M. le maréchal-duc de Richelieu, le 26 février 1789.

MONSIEUR,

Aucun nom, aucun rang, ne donne de droit à l'Académie, afin que les suffrages de cette compagnie, étant toujours libres, soient toujours flatteurs pour celui qui les obtient. Malgré la faveur que la reconnaissance attache ici au nom de Richelieu, l'académicien auquel vous succédez, est le seul de ce nom qu'on ait vu assis parmi nous depuis notre fondateur. Un autre académicien, dont le nom nous est recommandable à peu près au même titre, est aussi, depuis le chancelier Seguier, le seul de son nom qui ait été de l'académie. Leur mérite personnel fut leur titre véritable et le principal motif de nos suffrages.

Quant aux places, s'il en était quelqu'une qui pût donner des droits ici, ce serait sans doute celle d'instituteur de nos rois ; cependant pour nous renfermer dans l'honorable et difficile emploi confié à vos talens et à vos vertus, jamais aucun gouverneur d'aucun enfant royal n'était encore entré dans cette compagnie, et c'est un honneur qui commence à vous. L'Académie n'a compté parmi ses membres, ni les deux maréchaux de Villeroi, ni les Charost, ni les Châtillons, ni même ce célèbre Montausier, quoiqu'il aimât les lettres autant qu'il haïssait et la flatterie et la satyre, ni ce vertueux Beauvillier, digne coopérateur de Fénélon et son fidèle ami dans la disgrace, Beauvillier, fils et frère d'académiciens. L'exemple n'a donc rien fait pour vous, Monsieur, et tout vous est purement personnel dans l'honneur qui vous est déféré.

Le roi a vu par lui-même comment vous gouvernez sous ses lois cette belle province, berceau de votre race antique, et dont l'un des princes ses fils porte le nom. Il l'a vu, et il vous a choisi pour former l'héritier du trône; mais ce choix, tout glorieux qu'il est, n'aurait point entraîné nos suffrages s'il n'avait eu aussi pleinement un aveu que le choix des rois n'obtient pas toujours, l'aveu de la nation. -Puisse-t-elle applaudir ainsi en tout aux vues paternelles et patriotiques de ce monarque! Puissent

tous ses ordres réunis y concourir ! Nous la voyons. chargée enfin de se régénérer elle-même : le roi, pour assurer notre bonheur, le remet dans nos mains; répondons à sa confiance. Le génie tutélaire et réparateur qui veille auprès de lui au salut. de cet empire, prépare avec lui ce grand ouvrage de la restauration : ne nous opposons point à ses bienfaits. Il me semble entendre l'auteur de Brutus et de la Mort de César nous adresser en ce moment. ces vers prophétiques :

Vous pouvez raffermir par un accord heureux
Des peuples et des rois les légitimes nœuds,
Et faire encor fleurir la liberté publique
Sous l'ombrage sacré du pouvoir monarchique.....
Vous, Français, seulement consentez d'être heureux;
Ne vous trahissez pas, c'est tout ce que je veux.

Cette même nation, Monsieur, au milieu des grands objets qui l'occupent, a les yeux sur vous et sur vos augustes élèves, et vous entendez sa voix qui vous crie sans cesse :

Songez qu'en ces enfans tout Israël réside.

Vous savez quels vœux la philosophie a osé former; elle voudrait que les princes, nés. pour nous gouverner, ignorassent, s'il était possible, les hautes destinées qui les attendent; que, pour de-. venir de grands rois (disons mieux, de bons rois),

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