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HISTORIQUE ET CRITIQUE

SUR

PIERRE-PAUL RUBENS.

Une couleur des plus brillantes, une composition pleine de génie, une grande facilité d'invention, avec les idées les plus poétiques, telles sont les qualités qui distinguèrent Rubens, et lui firent donner le nom de Raphaël des Pays-Bas ; mais un dessin qui sans être incorrect est souvent outré, des figures qui manquent de grâce dans leur pose, des têtes dont l'expression, quoique vraie, est souvent sans noblesse, telles sont les causes qui empêchent de le placer sur le même rang que le prince de la peinture, quoique cependant ses tableaux méritent qu'on les étudie soigneusement, pour en imiter, s'il se peut, les beautés, en évitant toutefois leurs défauts.

Pierre-Paul Rubens naquit à Cologne le 28 juin 1557. Son père, échevin de la ville d'Anvers et professeur de droit, obligé de s'expatrier par suite de la révolution des Pays-Bas, n'en cultiva pas moins l'éducation de son fils, qui se distingua de bonne heure, et fit des progrès rapides dans ses études. La ville d'Anvers étant rentrée sous la domination espagnole, Rubens y revint, et fut placé comme page chez la comtesse de Lalain; mais son père étant mort, il eut la liberté de suivre son penchant, et fit consentir sa mère à lui laisser étudier la peinture. Placé d'abord chez Tobie Verhaest, peintre de paysage,

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NOTICE HISTORIQUE ET CRITIQUE

puis chez Adam van Oort, il étudia enfin chez Otto Venius, le plus habile peintre flamand de cette époque. Rubens, âgé de vingt-trois ans, se crut assez fort pour travailler sans autre guide que son propre génie ; il quitta donc son maître, et eut bientôt accès chez les personnes du plus haut rang, où il se fit remarquer tant par ses talens que par son éducation et une politesse extrême, dont il avait pu prendre aussi l'habitude chez son maître. Reçu à la cour de l'archiduc Albert d'Autriche, il fut, dit-on, envoyé par ce prince à Vincent de Gonzague, duc de Mantoue, qui l'accueillit fav crablement, et le retint près de lui comme un de ses gentilshommes, ce qui ne l'empêcha pas de préférer l'étude des beaux arts aux plaisirs et aux amusemens de la cour. Après un séjour de sept ans à Mantoue, il fut envoyé à Philippe III, roi d'Espagne, et fut chargé de magnifiques présens pour le duc de Lerme. Rubens ne tarda pas à trouver dans cette cour les mêmes avantages que dans celle qu'il quittait; il fit un grand nombre de portraits et des tableaux d'histoire qui lui valurent des sommes considérables.

En quittant l'Espagne, Rubens retourna à Mantoue; mais il y resta peu, et partit bientôt pour Rome, où, par ordre du duc de Gonzague, il fit la copie de plusieurs tableaux des plus grands maîtres. Il passa ensuite à Venise, fit, d'après Titien et Paul Véronèse, des études qui lui profitèrent. Cependant il ne devint pas imitateur de ces habiles coloristes; il se forma une manière qu'on trouvera peut-être plus éclatante, mais moins harmonieuse.

Rubens était à Gênes depuis quelque temps et y avait décoré l'église des Jésuites, quand il quitta tout à coup, dans l'espérance de revoir sa mère qui était tombée malade; mais il n'arriva qu'après sa mort, en 1600. Cette perte lui causa tant de chagrin, qu'il alla s'enfermer dans l'abbaye de Saint-Michel. Après quelques mois de retraite, il voulut fuir ces lieux qui ne lui offraient que de tristes souvenirs, et il se préparait à re

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tourner à Mantoue, quand les charmes d'Élisabeth Brants l'engagèrent à changer d'avis. En effet, déterminé à ne plus s'expatrier, il fit construire une maison qui existe encore à Anvers, et dans laquelle il réunit tous les tableaux, les bustes antiques et les vases de porphyre ou d'agate qu'il avait eu occasion d'acquérir pendant ses voyages. Cette collection remarquable ne resta pas long-temps en sa possession; il ne put la refuser au duc de Buckingham, qui lui en fit offrir soixante mille florins.

Avec une imagination vive et une grande facilité d'exécution, Rubens avait su cependant mettre beaucoup d'ordre dans ses habitudes et dans son travail; ses heures étaient réglées et ne prenaient jamais rien les unes sur les autres. Pour gagner du temps et orner son esprit de plus en plus, il ne peignait jamais sans se faire lire quelque ouvrage utile, dans une langue ou dans une autre, car ses études avaient été si variées à cet égard qu'il parlait sept langues différentes, dont trois, il est vrai, ont beaucoup de rapport entre elles, l'allemand, le flamand et le hollandais.

Malgré la rapidité avec laquelle Rubens travaillait, il pouvait à peine suffire aux demandes qui lui étaient faites, et pour y parvenir, il se fit quelquefois aider par plusieurs de ses élèves dans des parties où ils excellaient. Wildens et van Uden peignirent le paysage dans plusieurs de ses tableaux, Sneyders eut à y faire les animaux, ou bien des fleurs et des fruits. Une réputation si générale et basée sur tant de talent ne put défendre Rubens des attaques de la calomnie. Il se vit attaqué par des artistes à qui il avait été utile, et qui prétendirent que ce grand maître ne pouvait réussir qu'avec l'aide de ses élèves: il lui fut facile de démontrer le contraire en produisant à lui seul des paysages du plus grand effet.

Rubens fut appelé à Paris par Marie de Médicis pour peindre les principaux traits de sa vie, dans une des galeries de

IV

NOTICE HIST. ET CRIT. SUR P. P. RUBENS.

son palais nommé depuis Luxembourg. Il fit alors de petites esquisses en grisaille que Félibien a vues chez M. Claude Maugis, abbé de Saint-Ambroise, et qui sont maintenant dans la galerie de Munich. Rubens eut beaucoup de tourmens à supporter de la part de cette personne, suivant une lettre très curieuse qu'il écrivit en 1630 à M. Dupuy, et qui a été publiée dans l'Isographie des hommes célèbres.

Ce n'est pas seulement par ses talens dans la peinture que Rubens s'est fait remarquer; d'une humeur douce, d'une conversation facile et agréable, d'un esprit vif et pénétrant, et doué d'un son de voix agréable, il parlait bien et joua un rôle dans la diplomatie. Il fut chargé de différentes missions : l'une à la cour d'Espagne en 1628, où, indépendamment des présens qu'il reçut dn roi, il eut la charge de secrétaire du conseil privé, avec la survivance pour son fils; l'autre mission fut auprès de Charles Ier, roi d'Angleterre.

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Après quatre années de veuvage, Rubens épousa Hélène Forman, âgée de seize aussi remarquable par sa beauté que l'avait été sa première femme; mais il ne vécut que dix ans avec elle, et il mourut le 30 mai 1640. Vivement regretté, ses funérailles furent fort honorées, et il fut inhumé dans une chapelle derrière le chœur de l'église Saint-Jacques à Bruxelles.

Ses tableaux, répandus dans toute l'Europe, passent le nombre de deux cent cinquante; il eut plusieurs élèves, dont les plus célèbres sont Van Dyck, David Teniers le père, Jacques Jordaens, Corneille Schut, Diepenbeck, Van Thulden et Érasme Quellinus. Il forma aussi des graveurs qui firent école, et se sont fait remarquer par l'effet, et pour ainsi dire par la couleur qu'on admire dans leurs estampes. Les principaux graveurs qui ont travaillé d'après Rubens sont Lucas Vorsterman, Schelle et Boëce, natifs de Bolswert; Paul Pontius, Witdoeck, Pierre de Jode, Paneels et Guillaume de Leew.

HISTORICAL AND CRITICAL

NOTICE

OP

PETER PAUL RUBENS.

The most brilliant colouring, a composition full of genius, a great facility of invention, with the most poetical ideas, such are the qualities that distinguished Rubens, and acquired him the name of the Raphael of the Netherlands; but a style of drawing, which, without being incorrect, is often exaggerated, figures whose attitudes are ungraceful, heads the expression of which though true, is frequently deficient in dignity, such are the causes which prevent his being placed in the same rank with the Prince of Painting, notwithstanding that his pictures merit to be carefully studied, to imitate, if possible, the beauties, and to avoid the defects.

Peter Paul Rubens was born at Cologne, June 28, 1557. His father, an Alderman of the town of Antwerp, and a law-professor, who was obliged to leave his country, in consequence of the revolution, in the Netherlands, did not however the less cultivate the education of his son, who early distinguished himself, and made rapid progress in his studies. The town of Antwerp having returned to the Spanish yoke, Rubens returned, and was placed as a page with the Countess of Lalain; but the death of his father leaving him at liberty to follow his own inclination, he made his mother consent to let him study the art of painting He was first placed with Tobias Verhaest, a land

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