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gination. Un magistrat fameux, d'Éprémesnil, prit chaudement la défense de Cagliostro et de Mesmer.

L'illuminisme.

Certains esprits perdaient terre en quelque sorte, Saint-Martin publiait les incompréhensibles rêveries du Philosophe inconnu; on introduisait, on dévorait le livre extraordinaire de Swedenborg, intitulé : les Merveilles du ciel et de l'enfer, et des terres planétaires et australes, d'après le témoignage de ses yeux et de ses oreilles.

Francs-maçons.

Au-dessous de la politique et de la science, dans l'ombre et le silence, travaillaient les francs

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maçons vaste et vieille association d'hommes de tout rang et de tout pays qui, parmi ses initiés, comptait des princes et qui, sous des rites bizarres, quelque peu puériles, cachait et propageait des idées libérales.

La reine Marie-Antoinette. En présence de toutes ces choses merveilleuses qui attestaient la force, mais quel

1. Beaucoup de princes allemands, le prince de Galles, le grand-duc de Toscane, même Frédéric II, y étaient initiés. Le comte de Clermont fut grand maître jusqu'à sa mort, en 1771. (Geschichte der Freimaurerein in Frankreich, von G. Klos, 1853).

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quefois aussi le délire de la raison, l'opinion devenait la reine du monde, et les puissances les plus respectées devaient maintenant compter avec elle. Jadis la cour donnait le ton et la mesure à la société française; ce n'était pas Louis XVI qui pouvait continuer la tradition de Louis XIV, et la belle et gracieuse Marie-Antoinette s'était fait de nombreux ennemis à la cour par ses amitiés trop exclusives, dans le public par un dédain trop grand des règles de l'étiquette et des convenances royales. Elle délaissait Versailles pour Trianon', et croyait qu'une reine de France pouvait alors vivre pour ellemême. C'étaient les habitudes de la maison d'Autriche, mais ce n'étaient pas celles de la maison de Bourbon. Un soir, son carrosse s'étant brisé, elle se rendit dans un fiacre au bal de l'Opéra ; le lendemain, tout Paris commentait cette imprudence. Ainsi commençaient les médisances qui plus tard se changeront en colères, et éclateront d'une si terrible manière contre celle qu'on n'appellera plus que l'Autrichienne2.

1. Le grand Trianon, bâti par Mansart en 1676, est une fantaisie de Louis XIV, ennuyé de la solennité froide et incommode de Versailles; le petit, construit par Gabriel pour Louis XV, en 1766, fut donné par Louis XVI à Marie-Antoinette, qui fit dessiner un jardin à l'anglaise, avec lac, rivières, maisons rustiques. Une robe de percale blanche, un fichu de gaze, un chapeau de paille étaient la seule parure des princesses. Le plaisir de voir traire les vaches, de pêcher dans le lac, enchantait la reine. On y jouait la comédie; le Devin du village de Rousseau, le Barbier de Séville de Beaumarchais y furent représentés. La reine remplissait le rôle de Rosine. (Mémoires de Mme de Campan.)

2. Les ennemis de Marie-Antoinette furent d'abord et seulement à Versailles. Sa légèreté blessait des personnes qui ne la lui pardonnaient point. Ainsi le jour des révérences de deuil (après la mort de Louis XV), elle fut accusée d'avoir ri de la figure de quelques douairières; et le lendemain, une chanson d'une insolence extrême circula dans Versailles : Petite reine de vingt ans,

Vous qui traitez si mal les gens,

Vous repasserez la barrière..., etc. »

(Droz, t. I, p. 133.) Ce fut dès les premiers jours du nouveau règne que les adversaires de l'alliance autrichienne, les courtisans exclus de cette societé intime où se plaisait la reine, commencèrent la sourde guerre qui mina peu à peu la popularité que lui avaient value sa grâce, sa jeunesse et sa beauté. Et parmi ses ennemis, il y en avait de très-haut placés. Voy. la Correspondance du comte de la Marck, plus tard prince d'Aremberg, ami très-dévoué de la reine et du roi. Le comte de Provence lui disait un jour, en parlant du roi son frère: Sa faiblesse et son indécision sont au delà de tout ce qu'on peut dire. Pour vous faire une idée de son caractère, imaginez des boules d'ivoire huilées que vous vous efforceriez vainement de retenir ensemble.» (T. I, p. 125.) La Marck écrivait lui-même à M. de MercyArgenteau, ambassadeur d'Autriche : Il faut trancher le mot, le roi est incapable de régner. Voir Feuillet de Conches, Louis XVI, MarieAntoinette et Madame Élisabeth, lettres et documents inédits dont l'authenticité a été contestée. Le chevalier d'Arneth a publié sous le titre de Marie-Thérèse et Marie-Antoinette un recueil de lettres tirées des archives de Vienne et plus dignes de foi.

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Un événement malheureux montra, dès l'année 1784, les dispositions du public à son égard. Le cardinal de Rohan était alors le scandale de l'Église. Ambassadeur à Vienne, il y avait compromis son caractère de prêtre et de représentant de la France par une conduite légère et d'effroyables dépenses. Il disait qu'il était impossible à un gentilhomme de vivre avec 1 200 000 livres de rente. Son parent, le prince de Rohan-Guéméné, ayant fait une banqueroute de 30 millions qui ruina une foule de gens, le cardinal en était tout fier: Il n'y a, disait-il, qu'un souverain ou un Rohan qui puisse faire une pareille banqueroute. » Méprisé du roi, surtout de la reine, il était en complète disgrâce. Une intrigante, la comtesse de Lamotte, lui fit croire qu'elle était la confidente de Marie-Antoinette et que cette princesse était disposée à lui rendre sa faveur; elle appuyait ses insinuations par de fausses lettres où l'écriture de la reine était imitée à s'y méprendre. Elle alla jusqu'à lui promettre une entrevue, le soir, dans les jardins de Versailles, avec sa souveraine. Une fille qui ressemblait beaucoup à la reine joua le rôle que la comtesse lui avait appris, et le cardinal crut que rien ne serait plus refusé à son ambition. Or, quelque temps auparavant, deux joailliers avaient proposé à Marie-Antoinette un collier de la valeur de 1 600 000 livres qu'elle avait refusé, en ajoutant, avec le roi, que deux vaisseaux de guerre étaient plus utiles à la France que ce joyau. La comtesse persuada au cardinal que la reine avait grande envie du collier et qu'elle le chargeait de l'acheter secrètement pour elle! Il alla trouver les marchands, leur montra les lettres et se fit livrer le bijou, dont la comtesse fit aussitôt son profit. A quelque temps de là, les joailliers, inquiets de n'être pas payés, écrivent à la reine. Aussitôt tout se découvre. Le cardinal, arrêté à Versailles même, dans ses habits pontificaux, est envoyé à la Bastille. Le parlement, saisi de l'affaire, rend un arrêt qui le délivre, comme simple dupe, et condamne la comtesse à la marque et à la reclusion. Cette affaire fit le plus grand bruit, et quoique la reine y fût complétement étrangère, sa réputation souffrit beaucoup d'avoir été mêlée à ce scandale.

Louis XVI ne lui avait d'abord montré qu'une extrême froideur. Plus tard elle prit sur lui un très-grand empire. Ce fut après la retraite de Necker qu'elle commença à se mêler activement du gouvernement. Mais n'ayant pas le génie ad

ministratif de sa mère Marie-Thérèse, si elle voulait de l'influence, elle ne voulait pas du souci des affaires ; et comme elle ne prêtait à celle-ci qu'une attention distraite, elle ne pouvait donner à son influence une direction éclairée. Ce fut elle qui fit appeler de Calonne, en 1783, au contrôle général.

Calonne (1783-1787). - Calonne avait des connaissances en administration, une grande facilité de travail, mais c'était un dissipateur1. A peine nommé il vint trouver le roi: « Sire, j'ai 200 000 livres de dettes; un autre vous les cacherait et prendrait sur les fonds de son ministère : j'aime mieux vous le déclarer. » Le roi, étonné, va à son secrétaire, sans mot dire, et lui donne la somme en actions d'une compagnie; Calonne garda les actions, ses dettes se payèrent autrement. Ses principes financiers étaient ceux-ci : « Un homme qui veut emprunter a besoin de paraître riche, et pour paraître riche il faut éblouir par ses dépenses. L'économie est doublement funeste elle avertit les capitalistes de ne pas prêter au trésor obėrė; elle fait languir les arts que la prodigalité vivifie.» Théorie agréable à tous ceux pour qui les approches du trésor sont faciles. Les courtisans, les femmes étaient enchantés de ce ministre aimable, qui ne portait pas sur son front, comme Turgot et Necker, les soucis du pouvoir consciencieusement exercé, et qui prévenait une demande de la reine en lui disant : « Si c'est possible, madame, c'est fait; si ce n'est pas possible, cela se fera. Un prince racontait plus tard: « Quand je vis que tout le monde tendait la main, je tendis mon chapeau. » Le roi, dans son indolence, s'accommodait d'un personnage que rien n'embarrassait. Ces beaux dehors cachèrent 500 millions d'emprunts en trois ans et en temps de paix.

Le moment vint cependant de tout dévoiler au roi. Alors le prodigue se fit réformateur. Calonne imagina un plan où se mêlaient les idées de tous ses devanciers. Soumettre les privilégiés à l'impôt et à une subvention territoriale; établir des assemblées provinciales; diminuer la taille; décréter la liberté du commerce des grains, etc. « Mais c'est du Necker que vous me donnez là, s'écria le roi; c'est du Necker tout pur. Sire, répondit l'ennemi de Necker, dans l'état des choses, on ne peut rien vous offrir de mieux. >>

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1. L'abbé d'Espagnac, un des agents de Calonne, gagna en jouant sur les fonds publics 18 millions en six mois et les perdit en six jours.

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