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ÉLÉGIE DIXIÈME.

A MARATHUS.

Si tu devais trahir un malheureux amant,

Pourquoi, dans le secret, violer ton serment?
Insensé! le parjure en vain cache l'offense;
La peine à pas tardifs le poursuit en silence.
Ciel épargne l'ingrat : l'Amour peut une fois
Avec impunité se jouer de tes lois.

L'espoir de l'or instruit le mortel téméraire

A joindre des taureaux qui tourmentent la terre, A lancer sur les mers, esclaves des autans,

Les vaisseaux que du ciel guident les feux constans.
Au vil appât de l'or Marathus peut se rendre !

O flammes! réduisez ses richesses en cendre.
Bientôt un Dieu vengeur punira ses forfaits :
La poussière et les vents flétriront ses attraits;
Le soleil ternira l'élat de son visage;

Ses pieds se meurtriront dans un lointain voyage.

Admonui quoties: auro ne pollue formam;

Sæpe solent auro multa subesse mala.

Divitiis captus si quis violavit amoreni,
Asperaque est illi difficilisque Venus.
Ure meum potius flamma caput, et pete ferr
Corpus, et intorto verbere terga seca.

Nec tibi celandi spes sit peccare paranti.
Est Deus, occultos qui vetat esse dolos,
Ipse Deus tacito permisit lena ministro,

Ederet ut multo libera verba mero.

Ipse Dens somno domitos emittere vocem
Jussit, et invitos facta tegenda loqui.

Hæc

ego dicebam : nunc me flevisse loquentem, Nunc pudet ad teneros procubuisse pedes. Tunc mihi jurabas, nullo te divitis auri

Pondere, non gemmis vendere velle fidem Non, tibi si pretium Campania terra daretur, Non, tibi si Bacchi cura, Falernus ager. Illis eriperes verbis mihi, sidera coelo

Lucere, et puras fluminis esse vias.

Quin etiam flebas: at, non ego fallere doctus, Tergebam humentes credulus usque genas.

Quid faceres, nisi et ipse fores in amore puellæ?

Je t'ai dit si souvent : Ne vends point tes appas;
Plutus cache souvent tant de maux sous nos pas!
Et l'infidèle amant, épris de la richesse,
Allume le couroux de Vénus vengeresse.
O Dieux ! puissent plutôt les feux me dévorer,
Le fer ouvrir mon flanc, les fouets me déchirer!
Non, non, n'espère point céler ta perfidie;
En vain, à nous tromper, ta bouche s'étudie:
Bacchus force souvent le nectar indiscret
A délier la langue, à trahir le secret;
Messager de Morphée, un véridique songe,
A l'insu du menteur, révèle le mensonge.
Je te parlais ainsi, les yeux de pleurs poyés,
Et, j'en rougis encor, et j'embrassais tes pieds,
Tu jurais cependant que tout l'or de l'Asie,
Les moissons que nourrit la riche Campanie,
Les côteaux de Falerne et les faveurs des cours
Marchanderaient en vain tes vénales amours.
Ah! tu m'aurais fait croire, avec ce doux langage,
Que le ciel est sans astre, et la mer saus rivage.
Tu pleurais même, et moi, touché de tes douleurs,
Crédule, j'essuyais tes yeux baignés de pleurs.

Eh bien ! que feras-tu, si tu perds une amante?

Sit, precor, exemplo sit levis illa tuo ! O quoties, verbis ne quisquam conscius esset, Ipse comes multa lumina nocte tuli! Sæpe insperanti venit tibi munere nostro, Et latuit clausas post adoperta fores.

Tum miser interii, stulte confisus amari:
Nam poteram ad laqueos cautior esse tuos.
Quin etiam attonita laudes tibi mente cancbam:
At me nunc nostri, Pieridumque pudet.
Illa velim rapida Vulcanus carmina flamma
Torreat, et liquida deleat amuis aqua.

Sit procul a nobis, formam cui vendere cura est,
Et pretium plena grande referre manu.

At te, qui puerum donis corrumpere es ausus,
Rideat assiduis uxor inulta dolis.

Et cum furtivo juvenem lassaverit usu,
Tecum interposita languida veste cubet.
Semper sint externa tuo vestigia lecto,
Et pateat cupidis semper aperta domus.
Nec lasciva soror dicatur plura bibisse
Pocula, vel plures emeruisse viros.

Illam

sæpe ferunt convivia ducere Baccho,

Qu'un jour, à ton exemple, elle soit inconstante!
Ingrat! combien de fois, écartant des rivaux,

La nuit, devant tes pas, j'ai porté des flambeaux !
Complice de l'Amour, mon amitié fidèle

Mit souvent dans tes bras ta maîtresse rebelle.

Je crus à ton amour: que j'étais insensć!
Dans tes filets trompeurs je me suis enlacé.

Bien plus, je te chantais, épris d'un beaù délire ;
Je rougis de mes vers, je veux briser ma lyre.

Oui, Vulcain, je les livre à tes rapides feux!

Fuis! ah! fuis loin de moi, vil objet, monstre affreux, Qui, fier du prix honteux des faveurs les plus chères, As pu remplir tes mains de trésors adultères.

Mais toi, dont les présens ont séduit Marathus,
Puisse un jour, exercée aux ruses de Vénus,
Ton épouse infidèle, en ses ardeurs lascives,
́Epuiser d'un amant les caresses furtives,

Et pâle, languissante, et vaincue à son tour,
De la couche d'Hymen repousser ton amour,
La souiller, sans pudeur, de traces étrangères,
Et mettre ses appas à d'indignes enchères!
Que sa sœur, épuisant les coupes de Bacchus,

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