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Peu m'importe, Délie, ah! tu peux bien m'en croire! Je suis aimé; mon cœur ne veut point d'autre gloire. Près de toi j'aimerais à garder mes troupeaux,

A courber sous le joug le front de mes taureaux;

Ton amant, sur son coeur pressant ton cœur timide,
Dormirait mollement sur une terre aride.

Que sert un lit orné de la pourpre de Tyr,

Quand loin de sa maîtresse il faut veiller, gémir?

Le murmure des eaux, la mollesse et ses charmes,
Ne ferment point des yeux qu'amour remplit de larmes.

Malheur au cœur d'airain, qui, maître de ta foi,

Préfère les combats au bonheur d'être à toi :

Dût-il, par sa valeur, dompter la Cilicie,

Couvrir de camps vainqueurs une terre ennemie,
S'offrir éclatant d'or au regard du guerrier,

Et fatiguer les flancs d'un rapide coursier.

A mon dernier moment, puissai-je, ô mon amante,
Te voir, presser ta main de ma main défaillante!
Hélas! tu pleureras sur mon lit de douleurs,
Où tu viendras mêler tes baisers et tes pleurs.
Tu pleureras, Délie; oui, ton cœur est sensible;
Ton cœur n'est pas formé d'un acier inflexible.

Illo non juvenis poterit de funere quisquam
Lumina, non virgo, sicca referre domum.
Tu manes ne læde meos: sed parce solutis
Crinibus, et teneris, Delia, parce genis.

Interea, dum fata sinunt, jungamus amores;
Jam veniet tenebris mors adoperta caput.
Jam subrepet iners ætas, nec amare decebit,
Dicere nec cano blanditias capite.

Nunc levis est tractanda Venus, dum frangere postes
Non pudet, et rixas inseruisse juvat.

Hic ego dux, milesque bonus: vos signa tubæque,
Ite procul, cupidis vulnera ferte viris ;
Ferte et opes: ego composito securus acervo,
Despiciam dites, despiciamque famem.

L'amante et son amant, les larmes dans les

yeux,

Quitteront mon bûcher d'un pas silencieux. Épargne tes cheveux, n'outrage point tes charmes: Hélas! c'est bien assez du tribut de tes larmes.

Le temps presse, unissons nos transports amoureux :
Bientôt, le front couvert d'un voile ténébreux,
Sur les pas chancelans de la foible vieillesse,
La mort s'avancera. L'amour et son ivresse
Ne sied plus lorsque l'âge a blanchi les cheveux.
Mais aujourd'hui Vénus nous invite à ses jeux.
Soldat ou général, je cours sous ses bannières;
J'attaque mes rivaux, je force les barrières.
Fuyez, bruyans clairons, belliqueux étendards;

Fils de Mars, triomphez ou tombez sous les dards;
Moi, j'aime mieux braver, dans ma paisible aisance,
La pauvreté honteuse et l'altière opulence.

ADD

ELEGIA SECUNDA.

AD DELIA M.

DDE merum, vinoque novos compesce dolores,

Occupet ut fessi lumina victa sopor;

Neu quisquam multo perfusum tempora Baccho

Excitet, infelix dum requiescit amor.

Nam posita est nostræ custodia sæva puellæ,
Clauditur et dura janua fulta sera.

Janua difficilis domini, te verberet imber,
Te Jovis imperio fulmina missa petant.
Janua, jam pateas, uni mihi victa querelis,
Neu furtim verso cardine aperta sones.
Et, mala si qua tibi dixit dementia nostra,
Ignoscas: capiti sint, precor, illa meo.

Te meminisse decet quæ plurima voce peregi
Supplice, cum posti florida serta darem.

Tu quoque ne timide custodes, Delia, falle.

ÉLÉGIE DEUXIÈME.

A DÉLIE.

Oui, noyons dans le vin mes nouvelles douleurs ;

UI,

Que Bacchus ferme enfin mes yeux chargés de pleurs.
Son breuvage à longs flots se répand dans mes veines :
Ne me reveillez pas; seul il endort mes peines,
Depuis que ma Délie, au pouvoir d'un jaloux,
Voit sa porte s'armer d'inflexibles verroux.

Porte sourde à ma voix, que les vents et l'orage,
Que la foudre des Dieux te brisent dans leur rage!
Ah! plutôt sois sensible aux plaintes d'un amant ;
Sur tes gonds, sans crier, tourne furtivement,
Et qu'à moi seul un Dieu réserve la vengeance
Qu'appelait contre toi mon aveugle démence.
Tu le sais, bien souvent j'implorai tes faveurs,
Quand je parais ton front de couronnes de fleurs.

Toi, brave, ma Délie, un tyran qui t'outrage;
Il faut oser: Vénus seconde le courage.

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