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insanias multas in medio ejus, et calumniam patientes in penetralibus ejus 1. »

Nous devons maintenant rendre compte au publie d'une li

que nous avons prise. Au milieu des systèmes divers et contradictoires adoptés par les auteurs et les imprimeurs du seizième siècle, nous avons cru pouvoir sans inconvénient ramener tous les textes cités à l'orthographie moderne. Cette uni. formité, difficile et presque impossible à l'égard du Moyen Age, nous a paru toute naturelle à partir de la Renaissance, au moment où la langue s'arrête et se fixe définitivement. Sans altérer ni dégrader le style, elle permet de rajeunir des écrivains qui, sous l'enveloppe gothique dont on s'obstine à les charger, conservent un air de vétusté propre à effrayer le lecteur. Combien de gens n'osent aborder Rabelais et Montaigne surtout à cause de l'orthographe. D'ailleurs nous ne faisons ici qu'appliquer aux écrivains les bénéfices d'une réforme tout extérieure, qu'ils ont eux-mêmes réclamée et essayé d'introduire de leur vivant. Nous ne voyons pas qu'on imprime aujourd'hui Corneille, Racine, Molière, La Fontaine avec l'orthographe de leur temps, ni qu'ils y aient beaucoup perdu tout au contraire. Pourquoi n'en serait-il pas de même pour Marot, Rabelais, Ronsard, etc.?

Enfin, avant de terminer ce travail si plein de minutieuses et difficiles recherches, il nous reste à nous acquitter envers les hommes qui ont bien voulu nous prêter leur obligeant concours. Nous sommes heureux de remercier ici MM. Coquerel père et tils, qui ont mis libéralement à notre service leur riche bibliothèque et leur érudition si variée sur les premières années de la Réforme française; M. Pinçon, l'assidu et complaisant.

1.ite par M. Leber dans sa curieuse brochure sur la presse et les arpt lets.

2. Un juge compétent en cette matiere, M. Victor Leclerc, s exprime ainsi "ans son magistral discours sur l'état des lettres au quatorzième siècle : « Nos a furs ne seront jamais appréciés ce qu'ils valent s ils restent inintelliabies. Il faut pouvoir les lire aisément pour avoir le droit de les juger. »

gardien du catalogue de Sainte-Geneviève, vrai type du bibliothécaire tout entier au public et à ses livres; M. Barbier, qui, en ouvrant les trésors bibliographiques du Louvre, continue les traditions savantes et courtoises de sa famille; M. Dauban, l'intelligent conservateur des estampes et médailles, qui nous a permis de fouiller à notre aise la précieuse collection de la Bibliothèque impériale. C'est à eux que j'ai voulu consacrer les dernières lignes de cette préface, comme à des hôtes aimables, dont on garde le souvenir après un long voyage.

INTRODUCTION

FIN DU MOYEN AGE.

LES TEMPS NOUVEAUX.

Le Moyen Age finissait, les temps modernes allaient commencer. Dans l'ordre physique comme dans l'ordre moral, ce passage d'un monde à l'autre ne s'accomplit pas sans secousse et sans déchirement. Qui dit rénovation dit crise, et toute crise est le point aigu, le paroxysme de ce que nous sommes convenus d'appeler principe d'antithèse ou de contradiction 1. Ce principe se retrouve, comme nous l'avons déjà dit, au fond de toutes les œuvres et de toutes les sociétés humaines; il est à la fois cause de destruction et de progrès. Nous en avons suivi la trace du treizième au seizième siècle : nous l'avons vu mettant aux prises et dissolvant les uns par les autres les éléments contraires du Moyen Age, pour aboutir au double mouvement de la Renaissance et de la Réforme. C'est autour de ces deux pôles que va s'opérer la nouvelle évolution de l'humanité.

La science nous a raconté l'histoire des transformations du globe que nous habitons; elle a exhumé les bulletins de ces

1. V. la Satire au moyen âge, chap. I.

grandes journées de la Genèse, animaux et végétaux fossiles, races disparues, volcans éteints, océans taris ou refoulés. L'histoire politique et littéraire offre le même spectacle à qui remue les débris du passé. Là aussi se sont agitées toutes les convulsions d'un monde en travail, les éruptions et les soulèvements d'idées, l'écroulement des croyances et des institutions, le chaos ramené pour un moment avant qu'il en sorte une nouvelle création. Pour comprendre ce duel du passé et de l'avenir, de ce qui a été et de ce qui va être, il faut se rendre un compte exact des forces mises en présence, au moment où, tournant sur elle-même pour faire volte-face, la société oscille, hésite entre deux mouvements contraires, l'un qui la retire en arrière, l'autre qui la pousse en avant. Le dynamisme, dont on a singulièrement abusé depuis Hégel en philosophie comme en critique, est ici d'une rigoureuse application: il s'agit de déterminer les forces d'attaque et les forces de résistance. Tant que l'équilibre se maintient entre elles ou à peu près, la société vit, grandit et se développe par la lutte même : dès que cet équilibre est rompu, on s'achemine vers la catastrophe, terme inévitable de toutes les tragédies au théâtre comme dans l'histoire.

Quelles sont donc au seizième siècle les forces en présence et les moyens dont elles disposent? Les forces d'attaque sont la Renaissance et la Réforme: elles ont pour elles la jeunesse, l'audace, les aspirations de la liberté naissante, l'attrait du fruit défendu, l'enseignement novateur du Collége Royal, enfin la complicité de l'imprimerie. Les forces de résistance sont l'Église, la Sorbonne, le Parlement, et, sur certains points, la Royauté. Toutes les avenues de la science, de la justice, du pouvoir semblent encore fidèlement gardées. L'Église a ses richesses, son influence, ses anathèmes et ses bûchers; elle organise deux redoutables machines de guerre, les Jésuites et la Ligue, bien autrement efficaces que l'Armada de Philippe II. La Sorbonne a son innombrable milice de docteurs, de régents, d'écoliers, de

relieurs, de libraires, de copistes, toute une clientèle bruyante, bavarde, disputeuse, routinière, impitoyable au besoin; elle a ses grades qu'elle accorde ou refuse, son droit de censure contre les ouvrages et les auteurs. Le Parlement, indécis et flottant d'abord, mais bientôt rallié à la cause du passé, appartenant d'ailleurs, par instinct, par devoir et par tradition, comme la magistrature de tous les temps, au parti de la répression, a pour lui le double ascendant de l'autorité morale et de la force matérielle; son armée de greffiers, de procureurs, de sergents à pied et à cheval; la puissance occulte de la police, les secrets du grimoire des lois, l'enlacement des procès aux mille réseaux, où viennent se prendre la fortune, la réputation, la liberté, la vie même des citoyens. Il apporte à la Sorbonne et à l'Église le secours légal du bras sécuher, pour emprisonner, pendre ou brûler les dissidents. La Royauté, sympathique d'abord à la Renaissance et même à la Réforme, finit par se déclarer contre les novateurs; louvoyant et cherchant sa voie, elle brûle les protestants en France et s'allie avec eux en Allemagne ; elle s'unit à l'Église contre les Huguenots, et à la Réforme contre la Ligue, écrasant les partis l'un par l'au re et sortant de là, non sans peine, victorieuse de l'émeute et du poignard.

La vieille société ainsi gardée semblait devoir se défendre. longtemps encore et pourtant elle croulait de toutes parts. If y avait une raison bien simple pour que le Moyen Age expirât, raison souveraine, devant laquelle doivent s'incliner les regrets et les affections les plus légitimes, qu'il s'agisse des individus, des dynasties ou des sociétés, c'est qu'il avait fait son temps. Un jour vint où la Sibylle de Cumes déclara qu'elle se sentait vaincue par un Dieu supérieur : le sens prophétique, la parole, c'est-à-dire la vie, l'abandonnait. Le Moyen Age touchait à ce terme fatal. Peut-être eût-il pu durer encore à l'état d'ombre et de fantôme: l'histoire cite plus d'un exemple de peuple ou f'institution se survivant ainsi, quand l'âme a quitté le corps. Il

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