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Devant lui se levait tout le chœur du Parnasse ;
Euterpe le guidait, et lui montrait sa place;
Et le divin Linus, orné d'ache et de fleurs :
Reçois, lui disait-il, ce présent des neuf Sœurs,
Ces chalumeaux par qui le poëte d'Ascrée
Faisait sortir les pins de leur forêt sacrée :
Que Gryna, par tes chants, conserve son renom,
Et soit toujours le bois favori d'Apollon!

Il dit les deux Scylla : l'une a trahi son père! (5)
L'autre aux vaisseaux d'Ulysse, en proie à l'onde amère,
Offre ses flancs marbrés, ceints de monstres affreux,
Qui brisent sous leurs dents les nochers malheureux.
On voit fuir au désert et d'une aile nouvelle
Planer, sur son palais, la triste Philomèle; (6)
Térée ainsi puni, son barbare festin,

Et son corps transformé par un juste destin.
Chants heureux que Phébus, le divin interprète,
Enseignait aux lauriers, au pied du Taïgète,
Silène vous répète; et partout les vallons
Portent ses doux concerts jusqu'au sommet des monts.
Enfin Vesper paraît; délaissant ces bocages,

Les bergers à regret ferment les pâturages.

Ascræo quos ante seni quibus ille solebat
Cantando rigidas deducere montibus ornos :
His tibi Grynæi nemoris dicatur origo :
Ne quis sit lucus, quo se plus jactet Apollo.

Quid loquar? aut Scyllam Nisi, aut quam fama secuta est,
Candida succinctam latrantibus inguina monstris,

Dulichias vexasse rates, et gurgite in alto,

Ah! timidos nautas canibus lacerâsse marinis?

Aut ut mutatos Terei narraverit artus?

Quas illi Philomela dapes, quæ dona parârit?
Quo cursu deserta petiverit, et quibus ante
Infelix sua tecta supervolitaverit alis?

Omnia quæ, Phœbo quondam meditante, beatus
Audiit Eurotas, jussitque ediscere lauros,
Ille canit pulsæ referunt ad sidera valles.

Cogere donec oves stabulis, numerumque referre
Jussit, et invito processit Vesper olympo.

NOTES

SUR L'HYMNE DE LA CRÉATION DU MONDE ET DES MÉTAMORPHOSES.

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Nous avons admis une interversion légère dans les termes de la traduction, en donnant d'abord le résultat premier de la création, et entrant ensuite dans le détail, comme s'il y avait: Orbis concrevit ex primis exordiis, et ensuite Semina fuerunt coacta; ce qui revient au même. Tener et concrevit sont rendus par image et par équivalent. Tout le morceau est d'une assez grande difficulté, et il en faut tenir compte.

(2) Pasiphaé, jeune épouse du législateur Minos, roi de l'ile de Crète, aima, dit-on, un jeune homme nommé Taurus, et, sans doute, c'est ce qui donna lieu parmi les Grecs, peuple léger et railleur, à cette fable du taureau.

(3) Les filles de Prétus, roi d'Argos, se vantaient d'être plus belles que Junon, qui les frappa d'une folie furieuse : elles se croyaient changées en génisses.

(4) Gallus, grand général et grand poëte, qui a laissé plusieurs élégies dignes de Properce: il est le sujet de la dernière églogue de Virgile, dont il était l'ami.

(5) Il y eut deux Scylla : l'une qui trahit son père Nisus, roi de Mégare, et livra la ville aux ennemis; l'autre, fille de Phorcus, dieu inarin, qui fut changée en écueil sur le détroit qui est entre l'Italie et la Sicile. En face est l'écueil de Charybde, d'où vient le proverbe : Etre placé entre Charybde et Scylla.

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L'épithète d'infelix (infortunée), qui appelle l'intérêt, ne peut s'appliquer au farouche Térée, qui consomma un attentat odieux sur sa belle-sœur Philomèle, et ensuite lui coupa la langue, quoique plusieurs commentateurs, ainsi que M. Tissot lui-même, l'aient ainsi pensé. Cette épithète s'applique à la triste Philomèle, qui, sous sa forme nouvelle, plane quelque temps, ainsi que sa sœur, sur le palais qu'elle habite. Il parait d'ailleurs assez évident que ces désinences redoublées, parârit, petiverit, supervolitaverit, se rapportent toutes au même sujet, qui est Philomèle. L'histoire de Deucalion et Pyrrha, celle d'Atalante, les métamorphoses des deux Scylla, et de Térée et Philomèle, sont décrites avec les plus grands détails et le plus de charme dans le grand poëme d'Ovide; Virgile n'a pu ici qu'en donner les principaux traits. Le lecteur pourra lire ces morceaux dans Ovide, pour apprécier la différence de manière de deux grands poëtes sur un même sujet. Voir à cet égard la traduction en vers d'Ovide, par Fariau-Saint-Ange, membre de l'Académie française,

qui a donné tous les poëmes d'Ovide, et dont l'auteur de ce livre s'honore d'être le neveu. Voici quelques passages de M. Tissot :

Les bergers, dès longtemps le dieu qui les abuse
Leur promet ses chansons, que toujours il refuse,
De sa propre guirlande enchaînent le trompeur.
Mais ils tremblaient: Églé vient calmer leur frayeur,
Églé, de nos forêts la plus rare merveille.
Déjà ses doigts rougis de la mûre vermeille
Ont coloré le front et les tempes du dieu.

Il peint Gallus errant aux bords de l'Hippocrène;
Aux sommets d'Aonie une Muse l'entraîne,
Tout le sacré vallon se lève en son honneur,
On entend du hautbois l'immortel inventeur.

Dirai-je de Scylla les piéges effrayants,

Ses flancs d'albâtre armés de monstres aboyants,
Et les vaisseaux d'Ulysse, et tremblantes victimes,
Ses nochers en lambeaux trainés sous les abîmes?
Dirai-je Philomèle et son cruel festin?
Comment, nouvel oiseau, de son vol incertain,
Le malheureux Térée au bois se précipite,
Et sur ses propres toits voltige avant sa fuite.

DAPHNIS

ÉLÉGIE SUR LA MORT DE JULES CÉSAR

ARGUMENT. Le poëte introduit deux bergers, Ménalque et Mopsus, dont l'un dépeint les nymphes pleurant la mort de César, et les pasteurs lui élevant un tombeau; l'autre fait son apothéose.

M.

MÉNALQUE.

Mopsus, toi qui sais l'art d'enfler les chalumeaux,
Et moi celui des vers, au pied de ces ormeaux
Essayons-nous tous deux, couverts de leur feuillage.

MOPSUS.

Plus jeune, c'est à moi de céder à ton âge,

O Ménalque, ou plutôt viens sous cet antre obscur.
Évitons, loin du vent, un ombrage peu sûr.

La mousse ici pour nous sous le pampre s'étale.
MÉNALQUE.

Dans ces bois Amyntas seul prétend qu'il t'égale.

MOPSUS.

Amyntas? il prétend s'égaler à Phébus.

MÉNALQUE.

Commence, et redis-moi les combats de Codrus,
Alcon et ses honneurs, Phillis et son délire,
Et donnons nos chevreaux à garder à Tityre.

Mo.

M

MENALCAS.

Cur non, Mopse, boni quoniam convenimus ambo,
Tu calamos inflare leves, ego dicere versus,
Hic corylis mixtas inter considimus ulmos?

MOPSUS.

Tu major tibi me est æquum parere, Menalca;
Sive sub incertas Zephyris motantibus umbras,
Sive antro potiùs succedimus aspice ut antrum
Sylvestris raris sparsit labrusca racemis.
Montibus in nostris solus tibi certet Amyntas.
Quid, si idem certet Phoebum superare canendo?
Incipe, Mopse, prior; si quos aut Phillidis ignes,
Aut Alconis habes laudes, aut jurgia Codri.
Incipe pascentes servabit Tityrus hædos

MOPSUS.

M.

Je veux te dire un chant dont j'ai gravé les vers,
Dont ma main sur un hêtre a noté tous les airs.
Mais appelle Amyntas pour commencer la lutte.
MÉNALQUE.

Cher Mopsus, aux combats du chant ou de la flûte,
Cet Amyntas te cède, autant qu'à l'olivier

Cède le saule amer, la lavande au rosier.

MOPSUS.

Assez, ô bon Ménalque! à tes vœux je rends grâce.
Mais nous voici sous l'antre, et l'ombre nous fait place.
Les nymphes sur Daphnis, et sa cruelle mort, (1)
Gémissaient: bois, ruisseaux, vous déploriez son sort,
Quand sa mère embrassant ses misérables restes
Accusait et les dieux et les astres funestes.

Durant ces tristes jours, au bord des fraîches eaux,
Nul pasteur, ô Daphnis, n'amena ses taureaux;
Nul ne vit la génisse, ou le coursier superbe,
Toucher l'onde du fleuve, ou même effleurer l'herbe :
La forêt, le rocher, s'unit à nos douleurs,
Et le lion d'Afrique en répandit des pleurs.

Mo. Immo hæc, in viridi nuper quæ cortice fagi
Carmina descripsi, et modulans alterna notavi,
Experiar tu deinde jubeto certet Amyntas.
Lenta salix quantùm pallenti cedit olivæ,
Puniceis humilis quantùm saliunca rosetis :
Judicio nostro tantùm tibi cedit Amyntas.
Sed tu desine plura, puer successimus antro.
Extinctum Nymphæ crudeli funere Daphnim
Flebant vos coryli, testes, et flumina Nymphis,
Cùm, complexa sui corpus miserabile nati,
Atque Deos atque astra vocat crudelia mater.

Mo.

Non ulli pastos illis egêre diebus

Frigida, Daphni, boves ad flumina nulla neque amnem
Libavit quadrupes, nec graminis attigit herbam.

Daphni, tuum Ponos etiam ingemuisse leones

Interitum, montesque feri sylvæque loquuntur.
Daphnis et Armenias curru subjungere tigres
Instituit; Daphnis thiasos inducere Baccho,

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