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ÉLÉGIES.

LA MORT

DU GÉNÉRAL HOCHE.

1798.

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LE VIEILLARD D'ANCENIS'.

mes fils! partageons les communes douleurs, Pleurons Nantes gémit, Angers verse des pleurs ;

Un long crêpe a couvert ces riantes vallées;
Au bord du fleuve ému, nos tribus désolées
Célèbrent un héros qu'enferme le cercueil :
Hoche n'est plus, mes fils; et la France est en deuil!
Il ne brillera plus sur un char de victoire,
L'heureux libérateur des rives de la Loire ;
Puissant par la clémence et grand par les bienfaits,
Après avoir su vaincre, il sut donner la paix.

Vous connaissez l'ormeau qu'entouraient nos familles,

1. Cetté élégie a été lue à une séance publique de l'Institut: elle est imprimée dans les Mémoires de cette compagnie, Littéra ture et Beaux-arts, tom. III, pag. 30-36.

Quand, le dixième jour, nos guerriers et nos filles, Par de rustiques jeux fêtaient la liberté:

Il comptait trente hivers; mes mains l'avaient planté;
Des vieillards, des amans, son ombre était chérie;
Et son riant feuillage égayait la prairie.

Le fer n'insultait pas ses rameaux protecteurs,
Ses rameaux, doux abri des timides pasteurs,
Soit quand les eaux du ciel désaltéraient nos plaines,
Soit quand le Chien brûlant tarissait les fontaines.
Le voyageur qu'afflige un tronc inanimé,
Redemande en pleurant l'ombrage accoutumé.
Mais les flots de la Loire ont semé le ravage:
Il a péri, l'ormeau, délices du rivage;
Mes yeux l'ont vu tomber sans force et sans appui;
Hoche, plus jeune encor, est tombé comme lui.

Quels étaient les fléaux qui désolaient ces rives,
Quand il vint rassurer nos familles craintives!
Il parut son aspect enfanta des guerriers.
Avant lui, désertant les rustiques foyers,
Femmes, enfans, vieillards, cherchaient au sein des villes
Des jours moins inquiets et des nuits plus tranquilles;
Nos peuplades fuyaient des brigands inhumains,
Nés dans les mêmes champs qu'ont dévastés leurs mains.
Ils vengeaient, disaient-ils, la foi de nos ancêtres.
Hélas! ces malheureux, victimes de leurs prêtres,
De village en village apportant le trépas,

Calomniaient leur Dieu par des assassinats!
Mais ce Dieu les frappa de sa main vengeresse.
Quiberon! lieu célèbre et cher à ma vieillesse,
Tu n'as point oublié les braves d'Ancenis!
J'apprends que de nouveau les brigands réunis
Promènent dans les bois leurs drapeaux parricides;
Qu'on a vu sur nos bords des transfuges perfides
Qui, sous un joug impie, ardens à se ranger,
Ont mendié partout l'appui de l'étranger;

Que l'Anglais avec eux vient désoler nos plaines:
<«<L'Anglais! Dusang breton coule encor dans mes veines,
M'écriai-je aussitôt; je joindrai nos soldats;

« Le fer ne sera point trop pesant pour mon bras. <«< L'Anglais! Partons, mes fils, embrassons votre mère; << Armez-vous; donnez-moi le glaive héréditaire

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Qu'aux champs de Fontenoy ma jeunesse a porté, « Et que mes derniers coups vengent la liberté! » Nous partons, nous quittons votre mère alarmée; J'offre au jeune héros qui commandait l'armée Quatre guerriers de plus : le père et les trois fils; Vos bras, votre courage et mes cheveux blanchis. Il sourit. « J'y consens, soyez parmi les braves; « Hommes libres, dit-il, combattez les esclaves. » Ce jour même nous vit triompher sous ses lois; Et nous avons de près admiré ses exploits. Anglais, brigand, rebelle, inondaient le rivage; Mais la patrie enflamme et double le courage; La gaîté qui préside aux combats des Français

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