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moins que leur patriotisme était douteux; là, d'autres l'ont été par le motif contraire : vous avez su que, dans quelques départemens, il a suffi d'avoir été membre de l'une des Assemblées Nationales, pour que la cotisation à l'emprunt ait été portée beaucoup au-delà des facultés du prêteur.»>

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Presque par-tout les taxes ont été faites sans égalité comme sans proportion; il en est telles dont les contribuables ne pourraient pas payer le tiers d'obligation avec la totalité de leur fortune: on a vu des départemens taxés à un taux beaucoup plus fort que ceux à qui ils sont de beaucoup inférieurs en population comme en richesse; je vais citer quelques exemples qui viendront à l'appui de ce que j'avance. »

« Le département de la Haute-Garonne paie en contribution foncière 3,170,900 fr., et il n'est taxé à l'emprunt forcé que pour 204,034 francs, tandis que le département de l'Hérault, qui ne paie en contribution foncière que 2,708,900 fancs, est taxé à l'emprunt forcé pour 1,392,523 francs. »

« Le département de l'Aube paie en contribution foncière 1,803,000 francs, et n'est taxé qu'à 253,317 francs d'emprunt forcé, tandis que le département du Jura qui ne paie en contribution foncière que 1,399,500 francs, est taxé à l'emprunt forcé pour 993,977 francs. >>

« Je pourrais mulitiplier les citations de cettte nature.... Quel épouvantable chaos! Quel excès de déraison! Quel renverse

ment scandaleux de toutes les saines idées du bon ordre! où est l'égalité républicaine ! où sont les premières notions de la justice distributive! >>

« Non, mes collègues, il n'est pas possible que vous laissiez subsister plus longtemps une loi aussi monstrueuse ; je me plais même à espérer, que ceux qui l'ont faite, ou qui l'ont appuyée, se réuniront à la commission et à moi pour en demander le rapport, s'ils veulent bien considérer, qu'outre les suites funestes que sa seule promulgation a entraînées, elle est essentiellement de nature à n'être ni exécutée ni exécutable. »

«En vain ferait-on des lois pour ordonner l'écoulement du numéraire; nous avons trop bien appris qu'elles ne serviraient qu'à le resserrer encore plus : en vain voudrait-t-on faire séquestrer et vendre ensuite les proprié tés foncières de ceux qui ne paieraient pas; l'expérience nous a de même appris que les séquestres, qui ne servent le plus souvent qu'à déprécier des domaines jusquelà productifs, ne sont pas moins onéreux pour l'Etat que pour les propriétaires, »

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Quant aux ventes, le peu de rapport des droits d'enregistrement et de timbre nous avertit assez que l'emprunt les a frappés d'un discrédit mortel: Eh! de bonne foi, comment est-il possible de ne pas sentir que, tant qu'un pareil système serait prédominant, aucun porteur de fonds ne serait assez peu clairvoyant ni assez dupe pour les placer en évidence dans des possessions fon

çières, même vendues de gré à gré par les propriétaires, parce qu'elles l'exposeraient à des taxes arbitraires, et à plus forte raison dans des acquisitions de la nature supposée, dont l'origine lui rappellerait sans cesse les risques qu'il aurait personnellement à courir ! »

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« On a parlé de malveillans qui cachent exprès leur numéraire; certes, je suis trop convaincu qu'il existe de la malveillance dans bien des esprits; prenons donc garde à ne pas les aider nous-mêmes dans nos lois par le plus puissant de tous les auxiliaires l'intérêt personnel; n'alarmons plus les possesseurs de ce numéraire si facile à disparaître; attachons-nous sans relâche à provoquer leur confiance, au lieu de la repousser sans cesse: bientôt le besoin des plaisirs, l'habitude de toutes les jouissances, et sur-tout le désir de tirer un parti utile d'un métal qui ne sert à rien quand il est enfoui, ne tarderont pas à le remettre en circulation. >>

« On a dit encore que le peuple était inquiet depuis le rapport qui donne lieu à la discussion actuelle: sans doute il est inquiet, mais c'est dans un sens tout contraire à celui qu'on suppose. »

« Ce que j'appelle vraiment le peuple, c'est-à-dire, l'universalité des citoyens intéressés au bon ordre et au maintien de la République, cette masse respectable de la nation dont nous devons toujours suivre les volontés, désire, veut, commande le rap

port d'une loi qui a porté le taux de l'ar gent à une hausse exorbitante, qui a comme anéanti le commerce, qui a desséché tous les canaux de la richesse nationale, qui a jeté par-tout une léthargie de mort. »

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« Il faut donc se hâter d'abroger la loi sur l'emprunt progressif; mais, en même temps, comme les besoins de l'Etat sont urgens, il faut chercher un moyen qui puisse fournir des ressources promptes et sûres; c'est ce que produira le projet présenté par la commission, parce que l'arbitraire ne souillera plus le mode de sa perception; parce que chaque citoyen paiera d'une manière proportionnée à l'état de sa fortune; enfin, parce que j'y retrouve ces règles de justice distributive, trop souvent violées malgré que notre acte constitutionnel les ait doublement consacrées, et dans l'article 16 de la déclaration des droits, et dans l'article 306, où il est dit expressément, que les contributions de toute nature sont réparties entre tous les contribuables, à raison de leurs facultés. »

« Tant que les maximes républicaines seront chères aux Français, des termes aussi impératifs prêteront toujours une nouvelle force à l'équité et à la raison pour condamner absolument toute espèce d'impôt progressif.

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«En vain voudrait-on prétendre qu'un emprunt forcé n'est pas un impôt; le bon sens le plus grossier suffit pour repousser une pareille assertion et, pour le Français qui

connaît

connaît sa langue, le mot emprunt indiquera toujours une volonté spontanée et absolument indépendante; or il ne faut que lire la loi du 19 thermidor pour sentir qu'elle n'est pas marquée à ce caractère, puisque le séquestre, l'expropriation et les cachots sont destinés à ceux qui ne prêtent pas assez vite; ici, en me rappelant certaines voies de fait qui se commettent sur les grands chemins, je ferais une comparaison palpable, si la majesté de la tribune ne me l'interdisait. »

« A cet égard, j'attaquerai même la rédaction de l'article premier du projet que nous discutons maintenant; je voudrais que franchement, au lieu de ce mot emprunt qui annonce quelque chose de libre et dépendant de la volonté individuelle du prêteur, on employât cette expression, taxe extraordinaire de guerre, qui est la seule convenable vis-à-vis le peuple français, pour lui rappeler loyalement et sans détour les besoins pressans de la patrie et les devoirs de chaque citoyen. »>

J'applaudis d'ailleurs à l'heureuse idée qui a inspiré la commission, lorsqu'elle s'est déterminée à appliquer une prime de demipour cent par mois à ceux qui ont déjà payé tout ou partie de leur taxation à l'emprunt progressif: il est politique autant que juste de reconnaître le zèle des citoyens qui sont le plus prompts à obéir aux lois quelles qu'elles soient; d'ailleurs, outre que l'acquittement de cette prime ne grêvera pas beauIII.

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