<«<et les rues basses, un appareil de commerce en

grand, des monceaux de ballots, de tonneaux con

fusément jetés, une odeur d'inde et de droguerie « vous font imaginer un port de mer. Aux Pâquis, << aux Eaux-Vives, le bruit et l'aspect des fabriques

d'indiennes et de toiles peintes semblent vous transporter à Zurich. La ville se multiplie en quelque « sorte par les travaux qui s'y font; et j'ai vu des «gens, sur ce premier coup d'œil, en estimer le

peuple à cent mille âmes. Les bras, l'emploi du

au marché les légumes qu'il avait volés dans un jardin du voisinage de son maître ; il l'avoue lui-même dans ses Confessions: « J'allais tous les matins, dit-il, moissonner les plus belles asperges; je les portais au Molard, où quelque « bonne femme, qui voyait que je venais de les voler, me « le disait pour les avoir à meilleur compte. Dans ma frayeur, je prenais ce qu'elle voulait bien me donner; je « le portais à M. Verrat. Cela se changeait promptement " en un déjeuner dont j'étais le pourvoyeur, et qu'il parta«geait avec un autre camarade; car pour moi, très-con<< tent d'en avoir quelque bribe, je ne touchais pas même à << leur vin. » Ce Verrat était le complice ou plutôt l'instigateur des vols de Rousseau, qui se trouvait alors en apprentissage chez un graveur pour l'horlogerie. On sait combien les vices auxquels Jean-Jacques s'abandonna sans réserve dans sa jeunesse lui devinrent funestes par la suite : ils furent même en partie la source de ses premiers malheurs.

<< temps, la vigilance, l'austère parcimonie, voilà les « trésors du Genevois. >>

Les fortifications de Genève ont coûté de trèsgrandes sommes à l'Etat. Ce n'est point toutefois une ville imprenable; mais ses murs la défendent assez pour la mettre à l'abri d'un coup de main. Elle fut garantie d'une occupation en 1792 (1), en 1814 et en 1815. L'aspect des remparts n'a rien de bien imposant; ils sont incommodes parce que la ville a très-peu de portes, et qu'il faut souvent faire un long circuit pour y entrer mais, depuis une longue paix, tous ces bastions sont devenus des menades publiques. L'un de ces bastions, qui est de Rive, est connu sous le nom de Hesse, parce qu'on employa à sa construction une somme de dix mille écus, dont un landgrave de Hesse avait fait présent à la ville de Genève.

situé vers

la

porte

pro

L'entrée de France, où l'on remarque maintenant de belles maisons, est défendue par le bastion

(1) En 1792, le conseil exécutif avait ordonné au général Montesquiou d'assiéger Genève. Mais ce général, aussi humain que brave, voulant préserver la ville d'une invasion, entreprit de négocier avec les Genevois, et traita avec eux. On sait que sa conduite irrita la Convention, et qu'il fut obligé de fuir pour éviter un mandat d'arrêt lancé contre Jui.

de Cornavin, panorama charmant qui embrasse les

de de

trois grandes routes de Lausanne, de Gex et de th Lyon; au bout du rempart, en tournant du côté du lac, on voit un joli pont de fil-de-fer, qui sert passage pour aller aux Pâquis. L'entrée du Valais présente Genève sous un point de vue moins favorable que celle de France; mais le côté de la Savoie offre une avenue superbe et digne d'une grande capitale. Rien de plus imposant que cette dernière entrée : les beaux édifices qui la décorent, élevés sur des terrasses de soixante pieds de haut, présentent de magnifiques façades, et semblent habités plutôt par des princes que par de simples particuliers. On fermait autrefois les portes au déclin du jour, ce qui devenait fort incommode pour les personnes habitant la campagne, et qui allaient coucher à Genève; mais aujourd'hui les portes ne se ferment qu'à minuit, et l'on obtient facilement des permissions d'ouverture aux heures indues. On paie alors un léger droit d'entrée.

te

ral

Cathédrale de Genève (église de Saint-Pierre); sa fondation; son beau péristyle, modèle de la Rotonde de Rome. Intérieur de l'église. - Mausolée de Henri, duc de Rohan; abrégé de la vie de ce fameux guerrier. Tombeau d'Agrippa d'Aubigné; anecdotes sur cet homme célèbre. Recherches sur l'ancienneté de la cathédrale. -- Vue remarquable du haut de ses tours. - Clochers de l'église. Ancienne chapelle des Machabées; elle doit sa fondation à Jean de Brogny, qui, de simple pâtre, devint cardinal et évêque de Genève; anecdotes curieuses et intéressantes sur ce prélat. — Table d'hôte.

J'AVAIS fait plusieurs courses aux environs de Genève, et je m'étais plu à m'égarer quelquefois dans la ville, afin de mieux juger de son ensemble. Mon premier soin fut ensuite de visiter la cathédrale, qui porte encore le nom d'église Saint-Pierre.

L'époque de la fondation de ce beau monument n'est pas bien connue. Suivant la tradition la plus exacte, il aurait été construit à la fin du quatrième siècle, et achevé au commencement du sixième. Devenu la proie d'un incendie, il fut rebâti par

t

Gondebaud, et consacré en 517, sous le règne de Sigismond, par Avitus, archevêque de Vienne et métropolitain de Genève. L'opinion d'un auteur ancien, qui attribue la fondation de ce temple à Gontran de Bourgogne, ne repose sur aucune preuve; mais tous les historiens s'accordent à dire que vers la fin du dixième siècle il a été réparé dans sa forme actuelle, qui est celle d'une croix latine. Conradle-Salique, empereur , empereur d'Allemagne, en acheva la construction dans le onzième siècle, avec le secours des meilleurs architectes de l'époque; mais le pavé ne se fit que long-temps après. Plusieurs parties de ce bel édifice furent incendiées en 1334. Le 21 avril 1430, il fut consumé avec une grande partie de la ville; la tour septentrionale fut presque seule épargnée par le feu mais on le rebâtit entre 1505 et 1530, tel qu'on le voit aujourd'hui. Le

:

portail gothique fut détruit en 1749, et remplacé par un beau péristyle dans le genre de celui de la Rotonde de Rome. Ce portique est soutenu par des colonnes de marbre d'ordre corinthien, et offre un modèle assez exact du Panthéon: il fut élevé sur les dessins du comte Alfieri (1), l'un des plus ha

(1) Le comte Alfieri était parent du célèbre poète de ce

nom.