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perte, dont le rapport moyen des dépenses aux recettes d'exploitati
s'élève à 60, 70, 80 et même 90 0/0, sans prendre garde que
des deux tiers du réseau total ne donnent pas de produits s
sants pour faire face aux frais d'exploitation et à la rémunér
des capitaux de premier établissement? M. Ch. de Franquevi.
s'est-il pas demandé s'il n'y aurait pas quelques avantages,
un pays où la politique s'infiltre à travers les moindres que
d'affaires, à éloigner de l'État ce calice de responsabilité? Q
moi, je n'hésite point à envier ce régime anglais où l'Éta
tièrement désintéressé dans cette question de savoir si l-
plus ou moins légitimes d'une région sont ou non conver
satisfaits, si l'intérêt des capitaux engagés dans l'ind!
chemins de fer est ou non considérable. Comme il n'est.
part quelle proportion de kilomètres de voies ferrées
une nation, eu égard à la superficie de son territoire et
sa population, je ne sais pas si nos voisins d'outre-Man
de ces voies ferrées ou n'en ont point assez; mais je
ont autant qu'ils ont voulu et pu en faire, que le gouv
la reine est parfaitement désintéressé dans la so.
question insoluble. De même, ce n'est point à lui qu
dresser les actionnaires qui, ayant librement placé
cette industrie, trouvent que les dividendes de leurs actions
être insuffisamment rémunérateurs.

S'il y a gaspillage des capitaux, c'est un bien petit ma
blic. Les âmes sensibles s'en consoleraient aisémént
donnaient la peine de réfléchir qu'il en est ainsi, seule
moins facilement perceptible, pour toute industrie, po
merce. Avec les chemins de fer, un petit nombre d'exu
la statistique financière, en quelque sorte quotidiens
et donne parfois le vertige à l'observateur, si com
exactement renseigné; partout ailleurs, une multil
dont la statistique s'occupe à peine, parce que co
pour ne pas dire impossible. Mais le raisonnet
pour avertir que,-n'étant écrite nulle part, In
triels, de négociants, nécessaire à une nation,
branche quelconque de l'activité humaine,
pitaux est la conséquence fatale d'un tel ét
tion (pour employer un mot à la mode) s'
les non fortunés, les faibles, les maladroit
nes, compenser la prospérité des heureu
contribuer ainsi à l'établissement de col
instable. L'industrie des chemins de fe
culier sous ce rapport, ni au point dev

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port de l'application de cette règle fondamentale et salutaire il n'y a d'utile que ce qui se paie. Au point de vue politique, il peut évidemment en être autrement, mais dans des limites extrêmement restreintes et depuis longtemps dépassées chez nous, en ce concerne l'intérêt général. En France comme en Angleterre, il y a trop, beaucoup trop de chemins de fer; seulement la question ne se pose même pas en Angleterre, puisqu'ils s'y font librement. En France, au contraire, elle est insoluble, parce qu'il y a un passé sur lequel il est financièrement impossible de revenir et dont on ne paraît nulle part disposé à tenir compte dans les régions dirigeantes. On marche toujours en avant, comme si l'on n'avait pás complètement épuisé la liste des chemins de fer productifs et largement entamé celle des lignes condamnées à être pour le moins très-longtemps encore improductives, el c'est l'État qui est le régulateur de ce mouvement insensé qu'on prend pour du progrès.

Comment ne pas s'effrayer au sujet des secousses ainsi imprimées à ce régulateur? Ne connaît-on pas l'épisode qui a occupé en dernier lieu la Commission parlementaire des chemins de fer? Un ministre des travaux publics conclut avec la plus petite de nos grandes compagnies une convention relative à l'exécution d'une ligne secondaire. Sur les réclamations du conseil général intéressé, le successeur de ce ministre prépare un projet de loi concédant cette ligne et deux autres à une petite compagnie. La commission législative propose à l'Assemblée nationale d'attribuer l'une de ces dernières à la grande compagnie. Le ministre actuel, fidèle à la pensée qui a présidé à l'organisation du réseau, demande que cette grande compagnie soit instituée concessionnaire des trois lignes et donne d'excellentes raisons à l'appui de son opinion. Prévaudra t elle finalement? Je l'ignore; mais comme les choses se passeraient mieux en Angleterre, par cela seul qu'elles resteraient en dehors de la sphère gouvernementale! Ces compétitions industrielles ne sortiraient pas du domaine vulgaire des intérêts locaux et privés.

En résumé, ainsi qu'on s'en doutait bien un peu, les grands contours de la question des chemins de fer sont les mêmes en France et en Angleterre.

Tout d'abord, le régime d'autorité et le régime de liberté ont, sous le rapport de la multiplicité excessive des lignes, produit des résultats également merveilleux dans les deux pays où ils fonctionnent respectivement; ils ont également produit le même résultat final d'un monopole de fait, parce qu'il est inhérent à la na

ture de l'industrie, qui exclut toute possibilité de concurrence persistante, d'où des plaintes identiques de l'un et de l'autre côté du détroit la concurrence est désirée par le public, invoquée par des rivaux, qui la promettent toujours et ne la donnent jamais que momentanément, mais se fusionnent finalement, sous une forme ou sous une autre, avec les premiers occupants, qui deviennent nécessairement des associations très-puissantes. A ceux qui déplorent ce qu'ils appellent l'omnipotence de nos grandes compagnies doit être signalée cette déclaration faite, en 1858, à propos d'un détail concernant l'exploitation technique, par un homme d'État anglais : « Les compagnies sont très-puissantes et ont de nombreux défenseurs dans le Parlement; le ministre qui voudrait les gêner serait vite renversé. Il serait imprudent au gouvernement de faire acte d'autorité; s'il voulait l'essayer, il serait immédiatement brisé et provoquerait une réaction contre laquelle il ne pourrait pas lutter un instant » (tome I, p. 321).

La réglementation financière des compagnies de chemins de fer existe dans les deux pays, tout en étant plus sévère en Angleterre qu'en France. L'occupation temporaire des terrains, l'extraction des matériaux, l'expropriation forcée procèdent réellement des mêmes principes. L'administration des compagnies est identique des deux côtés de la Manche. Les frais proprement dits de construction, d'entretien, d'exploitation, sont sensiblement les mêmes. Chaque acte de concession fixe le maximum (uniforme en France, variable en Angleterre) des tarifs que le concessionnaire a le droit de percevoir. Dans l'application, les résultats ne paraissent pas différents « En présence d'un monopole, dit loyalement M. Ch. de Franqueville, il est évident que notre système protége mieux ou du moins doit, en principe, mieux protéger les intérêts du public; mais, en réalité, je ne suis pas certain, après avoir consulté sur ce point bien des personnes compétentes, que les expéditeurs anglais aient beaucoup plus de sujets raisonnables de plainte que les nôtres » (tome II, p. 402).

Nous sommes ainsi amenés, par une transition naturelle, aux différences des régimes anglais et français; elles sont inhérentes aux mœurs politiques et économiques des deux peuples. En Angleterre, pas de ministère des travaux publics, pas de budget des travaux publics, pas d'ingénieurs des travaux publics, peu d'administration et pas du tout d'uniformité, par conséquent. « Cette perpétuelle ingérence de l'État dans nos affaires nous serait insupportable; nous voulons rester maîtres absolus de nos tarifs et de nos services. Chez nous, l'exploitation des chemins de fer est une affaire administrative... Nous faisons du commerce et

non de l'administration; nous sommes des négociants, à la tête d'une grande industrie, et nous faisons tout pour attirer les clients, au lieu d'attendre qu'ils viennent nous trouver» (tome II, p. 419). Tel est le langage uniformément tenu à M. Ch. de Franqueville, quand il voulait savoir l'opinion des Anglais sur le régime français, et ce langage n'est, en somme, ni si sot ni si déplaisant aux économistes.

En ce qui concerne les voyageurs, « il est certain que l'ensemble du service de l'exploitation est, en général, plus satisfaisant en Angleterre qu'en France, à tous les points de vue, celui de la sécurité excepté » (Ibidem).

En ce qui concerne les marchandises, « comme résultat général, beaucoup plus de rapidité dans le service en Angleterre, tarifs moins élevés en France » (tome II, p. 433).

Finalement, comme il ne s'agit point ici d'une étude de détails, je crois pouvoir être en droit de conclure que toute la différence entre les deux nations se trouve dans la manière dont l'État y sanctionne l'établissement des voies ferrées.

M. Ch. de Franqueville ne se demande pas ce que le régime français aurait produit en Angleterre, puisque les mœurs économiques et politiques de nos voisins s'opposent à ce qu'ils adoptent nos errements; mais, se demandant si le régime anglais aurait produit en France des résultats supérieurs à ceux que nous avons obtenus, il n'hésite point à répondre négativement. Je crois qu'en ce qui a trait aux résultats matériels, nous en serions à peu près au même point, attendu que les desiderata semblent être identiques des deux côtés du détroit. Mais, en ce qui concerne nos mœurs politiques et économiques, je suis convaincu qu'il y a lieu pour nous de regretter l'application du régime anglais. Montesquieu dit quelque part: «Les lois doivent être tellement propres au peuple pour lequel elles sont faites, que c'est un grand hasard si celles d'une nation peuvent convenir à une autre. » Ce grand hasard me paraît se rencontrer dans l'espèce. Le régime français n'eût peut-être pas présenté de sérieux inconvénients en Angleterre, où, la forme du gouvernement étant depuis longtemps hors de discussion, le parlement ne comprend que des conservateurs et des progressistes, ces deux tempéraments nécessaires au fonctionnement normal d'une société civilisée. Le régime anglais aurait offert ce réel avantage en France, où la politique nous désagrége lentement, mais sûrement, de rendre l'État étranger à une source d'attaques incessantes. « En France, écrit M. Ch. de Franqueville (tome II, p. 405), le premier et souvent le dernier - mouvement est de s'adresser à l'État, de lui porter ses doléances, d'en tout attendre, d'en tout espérer,

3 SERIE, T. XXXVIII.

15 mai 1875.

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mais aussi de lui tout imputer et de le rendre responsable de tout grief. » C'est précisément cette situation des choses (qui n'est pas, d'ailleurs, particulière aux chemins de fer) que je trouve mauvaise et d'autant plus inquiétante que le côté pécuniaire du problème, s'opposant à lui seul à tout retour sur le passé de ce gros détail économique, 1 abandon des errements vicieux, n'a pour garantie que notre sagesse publique. L'avenir dira ce que vaut au juste le remède. E. LAME FLEURY.

LE FUTUR TARIF

DES DOUANES EN FRANCE

Circulaire ministérielle aux chambres de commerce et aux chambres consultatives. - De la refonte de notre tarif de douanes et de l'éventualité de nouveaux traités de commerce.- Dénonciation par l'Italie du traité Franco-Italien et négociations ouvertes en vue d'un accord futur.- Lettre de la Chambre de Lyon à ce sujet.

Le Journal officiel du 8 avril dernier contenait une circulaire du nouveau ministre de l'agriculture et du commerce aux chambres de commerce et aux chambres consultatives d'agriculture et des arts et manufactures, dont le texte se trouve reproduit plus loin.

La lecture de cette circulaire, en raison de certains passages, peu rassurants par les sous-entendus ou les insinuations qu'il semble d'abord permis d'y voir, ne nous eût laissé qu'une impression de doute et même d'inquiétude, si le Journal officiel du surlendemain ne nous avait apporté un second document, émané de la même source, et de nature, sinon à calmer tout à fait les appréhensions éveillées par le premier, du moins à nous mieux fixer quant au sens même et à la portée actuelle de la circulaire du 7 avril, à laquelle il peut servir à la fois de commentaire et de correctif.

Nous voulons parler du discours prononcé le 8 avril par M. le vicomte de Meaux au banquet que lui a offert la Chambre de SaintÉtienne, et en réponse au toast du Président.

Voici en quels termes le ministre a commencé son allocution:

Messieurs, le bienveillant et cordial accueil que je reçois ici m'émeut plus encore qu'il ne m'étonne. Ailleurs, dans le monde industriel et commercial au milieu duquel m'appellent maintenant mes fonctions, je

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