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D'ennui, ma mère, il se consume,
L'Anglais insulte à ses malheurs.
Tout jeune, Adrien m'a chérie ;
Il égayait notre foyer.

File, file, etc.

Pour lui je filerais moi-même:
Mon enfant, mais j'ai tant vieilli!
- Envoyez à celui que j'aime
Tout le gain par moi recueilli.
Rose à sa noce en vain me prie :
Dieu! j'entends le ménétrier!
File, file, etc.

-Plus près du feu, file, ma chère,
La nuit vient refroidir le temps.
Adrien, m'a t-on dit, ma mère,
Gémit dans des cachots flottans.
On repousse la main flétrie
Qu'il étend vers un pain grossier.
File, file, etc.

.

Ma fille, j'ai naguère encore
Rêvé qu'il était ton époux.
Même avant la trentième aurore,
Mes rêves s'accomplissent tous.
· Quoi! l'herbe à peine refleurie
Verra le retour du guerrier!
File, file, etc.

LE DAUPHIN.

CONTE.

AIR: du Carnaval.

Du bon vieux temps souffrez que je vous parle. Jadis Richard, troubadour renommé,

Eut pour roi Jean, Louis, Philippe, ou Charle,
Ne sais lequel, mais il en fut aimé.
D'un gros dauphin on fètait la naissance;
Richard à Blois était depuis un jour.
Il apprit là le bonheur de la France.
Pour votre roi, chantez, gai troubadour!
Chantez, chantez, jeune et gai troubadour!
La barpe en main, Richard vient sur la place.
Chacun lui dit : Chantez notre garçon.
Dévotement à la Vierge il rend grace,
Puis au dauphin consacre une chanson.
On l'applaudit; l'auteur était en veine.
Mainte beauté le trouve fait au tour,
Disant tout bas: Il doit plaire à la reine.
Pour votre roi, etc.

Le chant fini, Richard court à l'église.
Qu'y va-t-il faire? Il cherche un confesseur.
Il en trouve un, gros moine à barbe grise,
Des mœurs du temps inflexible censeur.
Ah! sauvez-moi des flammes éternelles !
Mon père, hélas! c'est un vilain séjour.
-Qu'avez-vous fait ?—J'ai trop aimé les belles.
Pour votre roi, etc.

Le grand malheur, mon père, c'est qu'on m'aime.
Parlez, mon fils; expliquez-vous enfin.
· J'ai fait, hélas! narguant le diadème,
Un gros péché, car j'ai fait un dauphin.
D'abord le moine a la mine ébalie;
Mais il reprend : Vous êtes bien en cour?
Pourvoyez-nous d'une riche abbaye.
Pour votre roi, etc.

Le moine ajoute: Eût-on fait à la reine
Un prince ou deux, on peut être sauvé.
Parlez de nous à votre souveraine;

Allez, mon fils, vous direz cinq Ave.
Richard absous, gagnant la capitale,
Au nouveau-né voit prodiguer l'amour.
Vive à jamais notre race royale!
Pour votre roi, etc.

LES NÈGRES

ET LES MARIONNETTES.

FABLE.

AIR: Pégase est un cheval qui porte.

Sur son navire, un capitaine
Transportait des noirs au marché.
L'ennui les tuait par vingtaine :
Peste! dit-il, quel débouché !
Fi! que c'est laid, sots que vous êtes:
Mais j'ai de quoi vous guérir tous.
Venez voir mes marionnettes;
Bons esclaves, amusez-vous.

Pour calmer leur douleur mortelle,
Soudain un théâtre est monté;
Soudain paraît Polichinelle,
Pour des noirs grande nouveauté.
D'abord ils ne savent qu'en dire,
Ils se regardent en dessous;

Puis aux pleurs se mêle un sourire :
Bons esclaves, amusez-vous.

Voilà monsieur le commissaire :
Il s'attaque au roi des bossus,
Qui, trouvant un exemple à faire,
Vous l'assomme et souffle dessus.
Oubliant tout jusqu'à leurs chaînes,

Nos gens poussent des rires fous;
L'homme est infidèle à ses peines:
Bons esclaves, amusez-vous.

Le diable vient : l'ange rebelle
Leur plait, surtout par sa couleur.
Il emporte Polichinelle :

Autre accroc fait à la douleur.
Cette fin charme l'auditoire :
Un noir a triomphé pour tous.
Ces pauvres gens rêvent la gloire.
Bons esclaves, amusez-vous.
Ainsi, voguant vers l'Amérique,
Où s'aggraveront leurs destins,
De leur humeur mélancolique,
Ils sont tirés par des pantins.

Tout roi la

peur que

désenivre Nous prodigue aussi les joujoux. N'allez pas vous lasser de vivre; Bons esclaves, amusez-vous.

LA MOUCHE.

Am: Je loge au quatrième étage.

Au bruit de notre gaîté folle,

Au bruit des verres, des chansons,
Quelle mouche murmure et vole,
Et revient quand nous la chassons? (bis.)
C'est quelque dieu, je le soupçonne,
Qu'un peu de bonheur rend jaloux.
Ne souffrons point qu'elle bourdonne,
Qu'elle bourdonne autour de nous.

Transformée en mouche hideuse,
Amis, oui, c'est, j'en suis certain,

La Raison, déité grondeuse,
Qu'irrite un si joyeux festin. (bis.)
L'orage approche, le ciel tonne,

Voilà ce que

dit son courroux :

Ne souffrons point qu'elle bourdonne,
Qu'elle bourdonne autour de nòus.

C'est la Raison qui vient me dire:
<< A ton age on vit en reclus.
» Ne bois plus tant, cesse de rire;
» Cesse d'aimer, ne chante plus. » (bis.)
Ainsi, son beffroi toujours sonne
Aux lueurs des feux les plus doux.
Ne souffrons point qu'elle bourdoune,
Qu'elle bourdonne autour de nous.
C'est la Raison: gare à Lisette!
Son dard la menace toujours.
Dieu ! il perce la colerette;

Le sang coule! accourez, Amours! (bis.)
Amours, poursuivez la félonne;
Qu'elle expire enfin sous vos coups.
Ne souffrons point qu'elle bourdonne,
Qu'elle bourdonne autour de nous.
Victoire! amis, elle se noie
Dans l'Aï que Lise a versé.
Victoire! et qu'aux mains de la joie
Le sceptre enfin soit replacé. (bis.)
Un souffle ébranle sa couronne;
Une mouche nous troublait tous.
Ne craignous plus qu'elle bourdonne,
Qu'elle bourdonne autour de nous.

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