Je me souviens, car j'ai bonne mémoire, Du premier jour où je te mis;
C'était ma fète, et, pour comble de gloire, Tu fus chanté par mes amis.
Ton indigence, qui m'honore, Ne m'a point banni de leurs bras: Tous ils sont prêts à nous fêter encore ; Mon vieil ami, ne nous séparons pas. A ton revers j'admire une reprise; C'est encore un doux souvenir. Feignant un soir de fuir la tendre Lise, Je sens sa main me retenir.
On te déchire, et cet outrage Auprès d'elle enchaîne mes pas. Lisette a mis deux jours à tant d'ouvrage ; Mon vieil ami, ne nous séparons pas.
T'ai-je imprégné des flots de musc et d'ambre Qu'un fat exhale en se mirant? M'a-t-on jamais vu dans une antichambre T'exposer aux mépris d'un grand? Pour des rubans la France entière Fut en proie à de longs débats;
La fleur des champs brille à ta houtonnière; Mon vieil ami, ne nous séparons pas.
Ne crains plus taut ces jours de courses vaines, Où notre destin fut pareil;
Ces jours mêlés de plaisirs et de peines, Mêlés de pluie et de soleil.
Je dois bientôt, il me le semble, Mettre pour jamais habit bas,
Attends un peu; nous finirons ensemble; Mon vieil ami, ne nous séparons pas.
LE VIN ET LA COQUETTE.
AIR: Je vais bientôt quitter l'empire.
Amis, il est une coquette
Dont je redoute ici les yeux.
Que sa vanité, qui me guette, Me trouve toujours plus joyeux. C'est au vin de rendre impossible Le triomphe qu'elle espérait.
Ah! cachons bien que mon cœur est sensible: La coquette en abuserait.
Faut-il qu'elle soit si charmante! Ah! de mon cœur prenez pitié! Chantez la liqueur écumante Que verse en riant l'Amitié. Enlacez le lierre paisible
Sur mon front qui me trahirait.
Ah! cachons bien que mon cœur est sensible: La coquette en abuserait.
Poursuivons de nos épigrammes Ce sexe que j'ai trop aimé. Achevons d'éteindre les flammes Du flambeau qui m'a consumé. Que Bacchus, toujours invincible, Ote à l'Amour son dernier trait.
Ah! cachons bien que mon cœur est sensible: La coquette en abuserait.
Mais l'Amour pressa-t-il la grappe D'où nous vient ce jus enivrant? J'aime encor; mon verre m'échappe : Je ne ris plus qu'en soupirant. Pour fuir ce charme irrésistible,.
Trop d'ivresse enchaîne mes pas. Ah! vous voyez que mon cœur est sensible : Coquette, n'en abusez pas.
LA COCARDE BLANCHE. COUPLETS FAITS POUR UN DINER OU L'ON CÉLÉBRAIT L'ANNIVERSAIRE DE LA PREMIÈRE ENTRÉE DES RUSSES, DES AUTRICHIENS ET DES PRUSSIENS A PARIS.
AIR: des Trois Cousines, ou Quand des ans la fleur printanière. Jour de paix, jour de délivrance, Qui des vaincus fit le bonheur; Beau jour qui vint rendre à la France La cocarde blanche et l'honneur ! Chantons ce jour cher à nos belles, Où tant de rois, par leurs succès, Ont puni les Français rebelles, Et sauvé tous les bons Français. Jour de paix, etc.
Les étrangers et leurs cohortes
Par nos vœux étaient appelés. Qu'aisément ils ouvraient les portes Dont nous avions livré les clefs! Jour de paix, etc.
Sans ce jour, qui pouvait répondre Que le ciel, comblant nos malheurs, N'eût point vu, sur la tour de Londre, Flotter enfin les trois couleurs?
On répétera dans l'histoire Qu'aux pieds des Cosaques du Don, Pour nos soldats et pour leur gloire, Nous avons demandé pardon. Jour de paix, etc.
Appuis de la noblesse antique, Buvons, après tant de dangers, Dans ce repas patriotique, Au triomphe des étrangers. Jour de paix, etc..
Enfin, pour sa clémence extrême, Buvons au plus grand des Henris, A ce roi qui sut, par lui-même, Conquérir son trône et Paris. Jour de paix, etc.
BARBARESQUE.
(1816.)
AIR: de Calpigi.
Proclamons la Sainte-Alliance Faite au nom de la Providence, Et que signe un congrès ad hoc, Entre Alger, Tunis et Maroc. Leurs souverains, nobles corsaires, N'en feront que mieux leurs affaires. Vivent des rois qui sont unis! Vive Alger, Maroc et Tunis!
Ces rois, dans leur Sainte-Alliance, Trouvant tout bon pour leur puissance,
Jurent de se mettre en commun Bravement toujours vingt contre un.
On dit qu'ils s'adjoindront Christophe, Malgré la couleur de l'étoffe. Vivent des rois, etc.
Ces rois, par leur Sainte-Alliance, Nous forçant à l'obéissance, Veulent qu'on lise l'Alcoran,
Et le Bonald et le Ferrand. Mais Voltaire et sa coterie Sont à l'index en Barbarie. Vivent des rois, etc.
Français, à leur Sainte-Alliance
droit d'assurance,
Nos censeurs anciens et nouveaux, Et nos juges et nos prévôts.
Avec eux, ces rois, sans entraves, Feront le commerce d'esclaves. Vivent des rois, etc.
Malgré cette Sainte-Alliance, Si du trône, par occurrence, Un roi tombait; que subito On le ramène en son château. Mais il soldera les mémoires Du pain, du foin et des victoires. Vivent des rois, etc.
Enfin, la Sainte-Alliance, peu qu'on paie à l'échéance; Il faut des rameurs sur les bancs, Et des muets aux rois forbans: Même à ces majestés caduques Il faudrait des peuples d'eunuques. Vivent des rois, etc.
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