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Le livre de M. L. Énault peut fournir un piquant sujet de comparaison avec un roman Afraja(1), qui jouit en Allemagne d'une popularité méritée, et qui vient d'être, pour la première fois, traduit en français dans une importante collection de romans étrangers que publient en ce moment MM. Lahure et Hachette. La scène se passe à la fin du XVIIIe siècle, sur les frontières de la Norwége et de la Laponie. Les héros sont un gentilhomme danois, des marchands de poisson, des usuriers, des baillis et un descendant des rois lapons, Afraja, qui finit par être brûlé comme sorcier. Les héroïnes sont deux charmantes femmes, l'une Norwégienne, l'autre Laponne et fille d'Afraja. C'est un récit plein de scènes émouvantes, de descriptions poétiques, et qui nous transporte au milieu d'une population aussi sauvage que le pays qu'elle habite. — Un autre roman, déjà bien célèbre en Allemagne, et qui fait partie de la même collection, Doit et Avoir (2), par M. Freytag, nous ramène dans le monde civilisé. Comme son titre le fait pressentir, c'est presque uniquement l'histoire d'une maison de commerce et de ses commis, depuis le chargeur jusqu'au chef de la maison. Mais de nombreux épisodes viennent se nouer à la trame primitive, et l'auteur sait démêler tous ces fils avec une rare habileté. Il y a des types et des caractères qui sont pris sur nature. Là aussi on trouve de charmantes descriptions d'intérieur et de paysages, des récits dramatiques, surtout quand l'auteur nous transporte dans les pays habités par la race polonaise, et nous fait assister à la lutte de l'élément germanique contre l'élément slave.

La bibliographie nous a fourni, dans ces derniers temps, quelques ouvrages que nous ne devons pas oublier. Après les dernières livraisons de la suite à la France littéraire, de M. Quérard, publiée par M. Bourquelot (3), sous le titre de la Littérature française contemporaine (8 volumes in-8), nous signalerons le Catalogue général de la librairie française au XIXe siècle, dû à M. Paul Chéron, de la Bibliothèque impériale (4). On y trouve indiqués, par noms d'auteurs, les ouvrages édités en France du 1er janvier 1800 au 31 décembre 1855. Le premier volume a paru, et

(1) Par Th. Mugge. 1 vol. in-18.

(2) 2 vol. in-18.

(3) En collaboration successive avec MM. Louandre et Maury.

(4) Paris, Jannet. Gr. in-8 à 2 colonnes.

va seulement jusqu'au milieu de la lettre B. Faisons des vœux pour que cette utile publication marche aussi vite que possible.

Un autre livre, qui deviendra nécessairement le vade-mecum, non-seulement du bibliographe, mais de tout travailleur, c'est le Nouveau mannel de la bibliographie universelle, que viennent de mettre au jour MM. Ferdinand Denis, P. Pinson et de Martonne (1). On sait quels services rend à chaque instant aux hommes studieux la table méthodique qui forme le quatrième volume du Manuel du libraire, si incomplète et spéciale qu'elle soit. Le plan adopté par les rédacteurs du Nouveau manuel est aussi bien conçu que bien exécuté ; la forme alphabétique qu'ils ont adoptée est sans contredit la plus commode, et leur dictionnaire est véritablement encyclopédique. On en peut juger dès les premières pages, qui contiennent les mots Abbeville Abeilles Académie Abyssinie

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- Accouchement—- Açores — Addison, etc. A la suite de chacun de ces mots se trouve une bibliographie plus ou moins longue des ouvrages qui se rapportent à ces différents articles. Les auteurs n'ont certainement pas la prétention de la donner comme complète, mais le choix des ouvrages indiqués (anciens ou modernes, français ou étrangers) me paraît là, comme ailleurs, fait avec un grand discernement. Les sujets les plus importants (comme Europe, France, Imprimerie, Voyages et bien d'autres) sont traités avec toute l'étendue désirable. L'ouvrage est terminé par une liste des Collections typographiques de la France et de l'étranger (106 colonnes), et un Catalogue des bibliothèques particulières qui ont eu quelque célébrité, catalogue qui n'occupe pas moins de quatre-vingt-six colonnes. Ce peu de mots donnera, nous l'espérons, une idée suffisante de cet excellent livre, fruit d'un immense travail, et de l'incontestable utilité dont il sera aux travailleurs, quel que soit le genre d'études auxquels ils se livrent. Nous désirons vivement qu'il s'épuise assez rapidement pour permettre d'en faire une nouvelle édition, et nous ne saurions trop engager l'éditeur à adopter alors un format plus commode, et surtout un caractère un peu moins microscopique.

A côté de la bibliographie, se place naturellement la Nouvelle Biographie générale (2), de

(1) 3 vol. in-18 ou 1 gr. vol. in-8. Paris, Roret. 20 fr. (2) Le dernier volume paru, le vingt et unième, s'étend de Goertz à Gréville.

Cette vaste publication | éditée par M. Derivaux, à Strasbourg, tout le succès qu'elle mérite.

MM. Firmin Didot.
avait d'abord été annoncée comme ne devant for-
mer que trente-cinq volumes, mais encouragés
par le succès qu'ils ont obtenu, les éditeurs ont
bravement pris leur parti. Ils ne donneront pas
moins de 45 volumes, et ils feront bien. La me-
sure était d'autant plus souhaitable que comme
les bons vins, l'ouvrage s'est singulièrement amé-
lioré en vieillissant; c'est une justice qu'il faut
lui rendre. Les matières sont plus exactement
coordonnées que dans les premiers volumes, où
nécessairement on allait un peu en tâtonnant.
La rédaction est généralement très-soignée. Les
articles les plus importants ont été rédigés par des
hommes spéciaux, et l'on a soigneusement rem-
placé par des faits la phraséologie malencontreuse
qui dépare tant d'articles de l'ancienne biographie
Michaud. Enfin, ce qui, pour les travailleurs, rend
l'ouvrage inappréciable, c'est l'indication des
sources placées à la fin de chaque article, excel- |
lente méthode renouvelée du Dictionnaire de Mo-
reri.

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De leur côté MM. Hachette et Ce ont commencé la publication des Chefs-d'œuvre de la littérature ancienne. Les deux premiers volumes contiennent les œuvres de Lucien, traduites pour la première fois complétement en français par un de nos professeurs les plus distingués, M. Eugène Talbot. Si le texte de l'illustre écrivain de Samosate a été suffisamment bien établi et commenté pour ne pas offrir de difficultés sérieuses, c'était une tâche délicate que d'entreprendre de faire passer dans notre langue la finesse, la verve et la mordante ironie d'un auteur que l'on a voulu, bien à tort, ce nous semble, comparer à Voltaire. M. Talbot s'en est tiré avec un grand bonheur, et une bonne partie de ses volumes offrira tout le piquant de la nouveauté au public fort nombreux qui ne connaît de Lucien que les Dialogues des morts, expliqués jadis au collége. Que d'autres dialogues charmants dont il n'a pas connaissance! Citons, entre autres, ceux où il nous a peint les lorettes d'Athènes comme on ne nous a pas encore peint celles de Paris. La préface contient une excellente biographie et une juste appréciation de Lucien. J'y signalerai pourtant une phrase que je ne m'explique guère: c'est celle où M. Talbot met Virgile au nombre des "terribles railleurs." J'avoue que même en songeant au sic vos non vobis qui est quelque peu apocryphe, je ne puis voir dans cette

Un autre dictionnaire biographique, mais fait à un point de vue tout à fait spécial, est poursuivi avec une courageuse persévérance par MM. Haag: nous voulons parler de la France protestante (1) dont la treizième partie nous mène jusqu'à Marot. Il est impossible d'apporter plus de soin et de conscience dans ce travail, qui a nécessité de pénibles et minutieuses recherches. Sans doute il est permis de ne point partager toutes les appré-expression qu'un lapsus calami. ciations des auteurs qui se sont placés à un point de vue exclusif, mais grâce à eux, une foule de particularités de notre histoire politique, littéraire et artistique ont été heureusement éclaircies.

Je ne puis finir sans mentionner deux collections très-importantes: L'une est la Collection populaire des auteurs anciens, traduite et annotée d'après les travaux les plus estimés par une société de professeurs et d'hommes de lettres sous la direction de M. Aloysius Kern. Le format est in-4° à 2 colonnes, disposé comme la collection des classiques publiés par M. D. Nisard; seulement l'exécution typographique est meilleure. Horace seul a paru. Le texte est revu avec soin et la traduction accompagnée de notes suffisantes m'a paru fort exacte. Le prix, d'ailleurs, en est peu élevé. Nous souhaitons à cette publication

(1) Chez Cherbullicz.

Si longue qu'elle soit, cette rapide énumération laisse encore de côté bon nombre de livres intéressants, que nous mentionnerons seulement aujourd'hui: les nouvelles éditions de Racan, de Bonaventure Despériers, de Coquillart (1), de l'Histoire de Paris par M. Théophile Lavallée, du premier et magnifique volume de la Muse historique de Loret, éditée par MM. Ravenel et de la Pelouze (2), des deux derniers volumes sur l'histoire de France de M. Michelet (3), qui à l'Oiseau vient d'ajouter l'Insecte (4); les Mélanges d'histoire littéraire de Guillaume Favre (5); le Gérard de Roussillon de M. de Terrebasse, un véritable joyau typogra(1) Bibliothèque elzevirienne. (2) Paris, Jannet.

(3) Guerres de religion. Henri IV et Richelieu. Paris, Chamerot.

(4) Paris, Hachette. In-12.

(5) Publiés par M. J. Adert, Genève. 2 vol. in-8.

phique, comme tout ce qui sort des presses lyon- | mais ils sont passagers; elle en est fâchée le mo

naises de Louis Perrin. Il y a eu encore en province d'excellentes publications historiques comme la Ligue en Bretagne, par M. Grégoire (1), les la Boderie (2) par M. le comte de la FerrièrePercy, à qui l'on doit déjà, un curieux Volume aujourd'hui épuisé, le journal de la comtesse de Sanzay. Nous aurions aussi aimé à régler cette fois notre compte trop arriéré avec les œuvres d'imagination dont quelques-unes méritent fort d'être distinguées: la Païenne de M. Laurent-Pichat, les nouvelles de M. Louis Ulbach, les Poésies nouvelles de M. Thalès Bernard; mais l'espace et le temps nous manquent, ce sera pour notre prochain numéro.

LUD. LALANNE.

MÉMOIRES INÉDITS DU DUC DE LUYNES SUR LE RÈGNE
ET LA COUR DE LOUIS XV.

MARIE LECZINSKA. - LE PRÉSIDENT HÉNAULT. Nous avons dit plus haut combien sont rares les mémoires historiques sur le XVIIIe siècle. Le Journal de l'avocat Barbier, les mémoires et autres écrits si curieux du marquis d'Argenson, nous fournissent des renseignements inconnus jusqu'alors. A ces précieux documents, MM. Dussieux et E. Soulié vont prochainement en ajouter un autre qui, bien que rédigé à un point de vue différent de celui des deux ouvrages dont nous venons de parler, n'en sera que plus intéressant. Grâce à l'obligeance habituelle de M. le duc de Luynes, qui s'est empressé de mettre à leur disposition le manuscrit de son aïeul, ils vont commencer prochainement, à la libraire Didot, la publication des mémoires inédits du duc de Luynes sur le règne et la cour de Louis XV (de 1735 à 1758). Cette publication formera environ quatorze volumes in-8. Pour donner une idée de l'intérêt qu'elle présentera, nous offrons à nos lecteurs quelques fragments qui viennent de nous être communiqués par les éditeurs, que nous prions de vouloir bien recevoir ici tous nos remercîments:

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ment d'après, et quand elle croit avoir fait peine à quelqu'un, elle est impatiente de le consoler par quelques marques de bonté. La reine devroit savoir beaucoup, car elle a beaucoup lu, et même des livres difficiles à entendre, par exemple les ouvrages du P. Mallebranche; elle les lit avec plaisir, cependant quelques gens croient qu'elle peut bien ne pas les entendre. Ses principales lectures, après celles de piété, sont des livres d'histoire; malheureusement elle n'a pas le talent de bien conter, et elle le sent fort bien; cependant il est aisé de voir qu'elle est instruite. D'ailleurs, elle entend avec finesse, et a des saillies et des reparties extrêmement vives. Elle passe facilement dans la conversation d'un sujet à un autre; les dissertations et longues conversations sur le même sujet paraissent l'ennuyer, et ce sentiment en effet est assez ordinaire.

» Elle aime la musique et joue de plusieurs instruments, médiocrement à la vérité, mais assez pour s'amuser; elle a la voix fort petite, mais fort douce. Quoiqu'elle ne soit pas grande et qu'elle n'ait pas ce que l'on appelle une figure fort noble, elle a un visage qui plaît et a beaucoup de grâce. Sa grande piété et sa vertu, qui viennent du tempérament et de l'éducation, l'ont mise à portée de jouir d'une liberté que jamais reine n'avait eue jusqu'à présent. Elle a au moins deux heures de temps à être dans ses cabinets le matin et trois ou quatre les après-dînées les jours qu'elle ne va point l'après-dînée à l'église. Dans ces heures particulières, elle voit qui elle veut, hommes et femmes, à son choix. Mais quoiqu'elle aime le ton de galanterie accompagné d'esprit et de prudence, et qu'elle entende parfaitement ce langage, elle n'a nulle idée du mal. Ce caractère naturel, soutenu par une piété vraie et éclairée, est le plus sûr de tous les préservatifs.

» La reine aime tendrement ses enfants et en est aimée de même. Elle vit avec eux dans une société douce, gaie et dans une confiance réciproque. Sa conduite avec le roi est très-décente, très-convenable et remplie d'attentions. Elle a toujours beaucoup craint le roi, même dans le temps qu'elle l'aimoit davantage; on peut croire qu'elle ne l'aime plus autant; cependant il n'est pas bien décidé qu'elle l'aime plus qu'elle le croit elle-même; ce qui est certain, c'est que sa crainte n'est point diminuée; mais le roi la traite bien et a de grandes

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La reine l'écrivait aussi à la duchesse de Luynes, sa dame d'honneur et son amie, dans une lettre datée de Marly, le 22 mai 1751 :

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J'espère que je ne feray plus que vous parler et point écrire. J'attends lundy (2) avec bien de l'impatience. Mme de Pompadour a eu de la fièvre hier et a été saignée ; cela m'a fait une peur horrible, dont j'avoue la charité n'a pas été tout le motif; mais cela alloit mieux hier au soir, et l'on disoit seulement qu'il n'y auroit point de voyage de Crécy (3), mais que nous nous en retournons toujours lundy. Je seray ravie de vous embrasser. »

On jugera par l'anecdote suivante quelles étaient les relations du roi et de la reine avant Mme de Pompadour. Elle se trouve dans les Mémoires du duc de Luynes, à la date du 19 avril 1744 :

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Il y a quelques jours la reine vint ici (chez le duc de Luynes, dans son appartement au château de Versailles) après souper, et se trouvant entre Me de Luynes et moi, la conversation tomba sur le départ du roi (4), qui occupe tout le monde. Je pris la liberté de lui demander si elle ne désireroit pas d'aller sur la frontière; elle me dit qu'elle le souhaitoit extrêmement; j'ajoutai : « Cela étant, Madame, pourquoi Votre Majesté ne le dit-elle pas au roi? » Elle me parut embarrassée d'avoir à parler au roi, et croire en même temps que le roi de son côté seroit embarrassé de l'écouter et encore plus de lui répondre. Enfin elle ne trouva point d'autre expédient que de lui écrire. C'étoit pendant le voyage de Choisy (5). Nous crûmes, Mme de Luynes

(1) C'est Mme de Pompadour qui avait ramené le roi à avoir pour la reine de la politesse et des attentions. Auparavant le roi était pour la princesse délaissée d'une incroyable rudesse.

(2) Jour du retour de la cour à Versailles.

(3) Crécy était un château situé dans la Beauce, à trois lieues de Dreux, et appartenant à Mme de Pompa

dour.

et moi, qu'elle prendroit ce temps pour envoyer sa lettre, mais elle nous répondit que cela feroit une nouvelle de voir arriver une lettre d'elle à Choisy; qu'elle aimoit mieux écrire quand le roi seroit ici; qu'elle étoit dans cet usage; que, quoiqu'elle vît le roi presque tous les matins à son petit lever, il y avoit toujours tant de monde qu'elle ne pouvoit lui parler en particulier. Jeudi matin (16 avril), effectivement, après avoir été quelque temps chez le roi et étant sur le point de s'en aller, elle lui remit elle-même sa lettre, mais avec beaucoup d'embarras, et s'en alla immédiatement. Je n'ai point vu cette lettre, mais j'ai ouï dire qu'elle lui offroit de le suivre sur la frontière de quelle manière il voudroit et qu'elle ne lui demandoit point de réponse. Vraisemblablement ce dernier article sera le seul qui lui sera accordé. »

Le président Hénault.

Au moment où parut l'Abrégé chronologique de l'histoire de France, le duc de Luynes écrit dans ses Mémoires, à la date du 24 mai 1744, le portrait suivant du président Hénault, avec lequel il étoit fort lié :

« M. le président Haynault, qui a toujours vécu dans la très-bonne compagnie, et qui a toujours paru se livrer beaucoup aux plaisirs de la société, a cependant infiniment lu, en ayant toujours eu pour objet de travailler à ce qui regarde le droit public et l'histoire. Depuis un grand nombre d'années, il a fait continuellement des extraits qui sont le fondement de l'ouvrage qu'il vient de donner. C'est l'homme du monde qui sait le plus dans presque tous les genres, au moins dans les genres agréables et utiles à la société. La galanterie, les grâces dans l'esprit, les charmes de sa conversation, le talent de paroître s'occuper avec plaisir, même avec passion, de ce qu'il sait plaire à ses amis, celui de savoir choisir dans une histoire les faits intéressants et les plus dignes de curiosité, de beaucoup dire en peu de paroles, l'élégance, l'éloquence, les portraits, c'est le caractère de M. le président Haynault, et il sera aisé d'en juger par son livre. Il jouit d'un revenu considérable; il a une jolie maison qu'il a achetée depuis peu d'années dans la rue Saint-Honoré. Il donne à souper

(4) Le roi allait partir pour l'armée de Flandre; la duchesse de Châteauroux le suivit pendant cette campagne, qui se termina par la grande maladie que fit le teau de Choisy à la mode nouvelle, en petits apparteroi à Metz. ments. Il y allait souvent passer plusieurs jours, en com(5) On sait que Louis XV avait fait accommoder le châ-pagnie de sa maîtresse et de quelques familiers.

très-souvent, fait fort bonne chère, a grand nomd'amis et vit avec tout ce qu'il y a de plus considérable et de plus aimable en hommes et en femmes. "

Et le 16 novembre 1747 :

« La reine marque à M. le président Haynault beaucoup de bonté et le désir de le voir. M. le président Haynault a l'esprit fort aimable et très-orné dans tous les genres. Il a de la douceur dans le commerce, de la politesse et de l'agrément. La reine a pris goût à son esprit. Tous les jours, après son dîner, elle le fait venir dans ses cabinets, elle le fait asseoir et reste une heure ou deux en conversation avec lui. Lorsque la reine a soupé chez moi (1), les jours maigres, elle a voulu manger seule dans un cabinet, parce qu'elle fait gras. Après qu'elle a soupé, elle nous envoie souper, Mme de Luynes et moi, et reste en conversation avec le président pendant tout le souper. »

En parlant du président Hénault, dans une lettre écrite au duc de Luynes, qui était au château de Dampierre, la reine dit encore: « Vous avez le président à présent; j'en suis ravie, car la solitude à la campagne donne des vapeurs, et notre président vaut mieux tout seul que si la maison étoit remplie (2). "

SUR LA DÉCOUVERTE, A MAYENCE, D'UNE PRESSE
ATTRIBUÉE A GUTENBERG.

Il n'est pas de voyageur qui, passant par Mayence, n'ait à cœur de visiter la maison Zum Jungen, située rue des Franciscains, à peu de distance de la cathédrale. Au XVe siècle, cet hôtel, ou celui qu'il remplace, appartenait à un patricien de Mayence, nommé Jean Gensfleisch, oncle de Jean Gensfleisch de Gutenberg, l'immortel inventeur de l'imprimerie.

Cet hôtel est aujourd'hui occupé par une brasserie. Le 22 mars 1856, le propriétaire, M. Borzner, faisait creuser une petite cour qui précède son établissement. Il s'agissait d'y établir une cave nouvelle. A cinq mètres environ de profondeur auété remblayé dans des temps modernes), les terdessous du sol actuel (que l'on sait d'ailleurs avoir rassiers rencontrèrent et mirent en lumière une pièce de bois. Cette traverse, en chêne, offre un mètre de développement. Elle est taillée carrément de 10 centimètres de côté environ et se termine, aux deux bouts, par un axe carré plus petit que la traverse, qui devait s'emmancher dans quelque mortaise à droite et à gauche. De plus, elle est percée au milieu d'un trou à vis, ou écrou. En un mot, la pièce en question convient parfaitement à la traverse d'une presse. On voit enfin sur la face antérieure, cette inscription lisiblement gravée : J. MCDXLI. G.

Cette découverte fit grand bruit à Mayence, dont les habitants sont très-jaloux, et à juste titre, d'avoir donné naissance à l'imprimerie. Un honorable antiquaire du pays, M. Ch. Klein, professeur du collége Grand-Ducal de Mayence, publia sur ce sujet une brochure, que nous avons sous les yeux, et qui a pour titre : Sur Gutenberg et le fragment de sa presse trouvé dans la maison où il a établi sa première imprimerie, Mayence, 1856, in-8. On y voit, page 59, gravée sur bois, une image très-exacte de la traverse en question.

Le titre de cette brochure contient à lui seul les conclusions de la notice. L'inscription est ainsi interprétée : la date de 1441, entre J et G, initiales de Jean Gensfleisch ou Gutenberg. D'après M. Klein, nous aurions là sous les yeux un débris de la première presse avec laquelle l'inC'est au Jungen qu'habitait, de 1450 à 1455, venteur aurait inauguré sa sublime découverte. Gutenberg, pendant la période de son association «Heureuse la maison, dit-il en terminant, qui avec Fust. C'est là que fut sans doute imprimé le conserva ce précieux trésor et le rendit au jour premier livre : la Bible de 1455, dite à quarante- à une époque où l'on sait apprécier son prix ! Heudeux lignes (3), chef-d'œuvre admirable, et préreux aussi celui qui l'a découvert! - Aux premice, en même temps, de la plus grande inven-miers jours de la découverte, un touriste parisien tion des temps modernes.

(1) La reine allait souper presque tous les soirs chez le duc de Luynes.

(2) Lettre du 19 juin 1716.

(ajoute ici en note M. Klein) offrit à M. Borzner pour ce fragment la somme de 25,000 francs. -Heureux enfin quiconque jouit de l'occasion de voir ce fragment, afin qu'il puisse rendre hom

(3) Il en existe à Paris deux exemplaires à la Biblio- mage et exprimer personnellement sa gratitude thèque impériale.

aux mânes du grand homme qui, par ce simple

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