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PERSONNAGES

ANGELO MALIPIERI, podesta.

CATARINA BRAGADINI.

LA TISBE.

RODOLFO.

HOMODEI.

ANAFESTO GALEOFA:

ORDELAFO.

ORFEO.

GABOARDO.

REGINELLA.

DAFNE.

UN PAGE NOIR.

UN GUETTEUR DE NUIT.

UN HUISSIER.

LE DOYEN DE SAINT-ANTOINE DE PADOUE.
L'ARCHIPRÊTRE.

Padoue, 1549. Francisco Donato étant doge.

PREMIÈRE JOURNÉE

LA CLEF

Un jardin illuminé pour une fête de nuit. A droite, un palais plein de musique et de lumière, avec une porte sur le jardin et une galerie en arcades au rez-dechaussée, où l'on voit circuler les gens de la fête. pierre. A gauche, un autre banc sur lequel on homme endormi. Au fond, au-dessus des arbres, la silhouette noire de Padoue au seizième siècle, sur un ciel clair. Vers la fin de l'acte, le jour paraît.

Vers la porte, un banc de distingue dans l'ombre un

SCÈNE PREMIÈRE.

LA TISBE, riche costume de fête; ANGELO MALIPIERI, la veste ducale, l'étole d'or; HOMODEI, endormi; longue robe de laine brune fermée par devant, haut-de-chausses rouge; une guitare à côté de lui.

LA TISBE.

Oui, vous êtes le maître ici, monseigneur, vous êtes le magnifique podesta, vous avez droit de vie et de mort, toute puissance, toute liberté. Vous êtes envoyé de Venise, et, partout où l'on vous voit, il

DRAME. - III.

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semble qu'on voit la face et la majesté de cette république. Quand vous passez dans une rue, monseigneur, les fenêtres se ferment, les passants s'esquivent, et tout le dedans des maisons tremble. Hélas! ces pauvres padouans n'ont guère l'attitude plus fière et plus rassurée devant vous que s'ils étaient les gens de Constantinople, et vous le Turc. Oui, cela est ainsi. Ah! j'ai été à Brescia. C'est autre chose. Venise n'oserait pas traiter Brescia comme elle traite Padoue. Brescia se défendrait. Quand le bras de Venise frappe, Brescia mord, Padoue lèche. C'est une honte. Eh bien, quoique vous soyez ici le maître de tout le monde, et que vous prétendiez être le mien, écoutez-moi, monseigneur, je vais vous dire la vérité, moi. Pas sur les affaires d'état, n'ayez pas peur, mais sur les vôtres. Eh bien, oui, je vous le dis, vous êtes un homme étrange, je ne comprends rien à vous, vous êtes amoureux de moi et vous êtes jaloux de votre femme!

ANGELO.

Je suis jaloux aussi de vous, madame.

LA TISBE.

Ah! mon Dieu! vous n'avez pas besoin de me le dire. Et pourtant vous n'en avez pas le droit, car je ne vous appartiens pas. Je passe ici pour votre maitresse, pour votre toute-puissante maitresse, mais je ne le suis point, vous le savez bien.

ANGELO.

Cette fête est magnifique, madame.

LA TISBE.

Ah! je ne suis qu'une pauvre comédienne de théâtre, on me permet de donner des fêtes aux sénateurs, je tâche d'amuser notre maître, mais cela ne me réussit guère aujourd'hui. Votre visage est plus sombre que mon masque n'est noir. J'ai beau prodiguer les lampes et les flambeaux, l'ombre reste sur votre front. Ce que je vous donne en musique, vous ne me le rendez pas en gaîté, monseigneur. Allons, riez donc un

peu.

ANGELO.

Oui, je ris. Ne m'avez-vous pas dit que c'était votre frère, ce jeune homme qui est arrivé avec vous à Padoue?

Oui. Après?

LA TISBE.

ANGELO.

Vous lui avez parlé tout à l'heure. Quel est done cet autre avec qui il était?

LA TISBE.

C'est son ami. Un vicentin nommé Anafesto Galeofa.

ANGELO.

Et comment s'appelle-t-il, votre frère?

LA TISBE.

Rodolfo, monseigneur, Rodolfo. Je vous ai déjà expliqué tout cela vingt fois. Est-ce que vous n'avez rien de plus gracieux à me dire?

ANGELO.

Pardon, Tisbe, je ne vous ferai plus de questions. Savez-vous que vous avez joué hier la Rosmonda d'une grâce merveilleuse, que cette ville est bien heureuse de vous avoir, et que toute l'Italie qui vous admire, Tisbe, envie ces padouans que vous plaignez tant. Ah! toute cette foule qui vous applaudit m'importune. Je meurs de jalousie quand je vous vois si belle pour tant de regards. Ah! Tisbe! - Qu'est-ce donc que cet homme masqué à qui vous avez parlé ce soir entre deux portes?

LA TISBE.

Pardon, Tisbe, je ne vous ferai plus de questions. - C'est fort bien. Cet homme, monseigneur, c'est Virgilio Tasca.

Mon lieutenant?

ANGELO.

LA TISBE.

Votre sbire.

ANGELO.

Et que lui vouliez-vous ?

LA TISBE.

Vous seriez bien attrapé, s'il ne me plaisait pas de vous le dire.

Tisbe!...

ANGELO.

LA TISBE.

Non, tenez, je suis bonne, voilà l'histoire. Vous savez qui je suis, rien, une fille du peuple, une

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