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PERSONNAGES

MARIE, reine.

JANE.

GILBERT.

FABIANO FABIANI.

SIMON RENARD.

JOSHUA FARNABY.

UN JUIF.

LORD CLINTON.

LORD CHANDOS.

LORD MONTAGU.

MAITRE ENEAS DULVERTON.

LORD GARDINER.

UN GEOLIER.

SEIGNEURS, PAGES, GARDES, LE BOURREAU.

Londres 1553

PREMIÈRE JOURNÉE

L'HOMME DU PEUPLE

Le bord de la Tamise. Une grève deserte. Un vieux parapet en ruine cache le bord de Tean. A droite, une maison de pauvre apparence. A l'angle de cette maison, une statlette de la Vierge, au pied de laquelle une étoupe brûle dans un treillis se fer. Aa fund, au delà de la Tamise, Londres. On distingue deux hauts édifices, la tour de Loires et Westminster. — Le jour commence à baisser.

SCÈNE PREMIÈRE.

P..sieurs hommes groupés çà et là sur la grève, parmi lesquels SIMON RENARD; JOHN BRIDGES, BARON CHANDOS; ROBERT CLINTON, BARON CLINTON; ANTHONY BROWN, VICOMTE DE MONTAGU.

LORD CHANDOS.

Vous avez raison, milord. Il faut que ce damné italien ait ensorcelé la reine. La reine ne peut plus se passer de lui; elle ne vit que par lui, elle n'a de joie qu'en lui, elle n'écoute que lui. Si elle est un jour sans le voir, ses yeux deviennent languissants, comme du temps où elle aimait le cardinal Polus, vous savez?

SIMON RENARD.

Très amoureuse, c'est vrai, et par conséquent très

jalouse.

LORD CHANDOS.

L'italien l'a ensorcelée!

LORD MONTAGU.

Au fait, on dit que ceux de sa nation ont des philtres pour cela.

LORD CLINTON.

Les espagnols sont habiles aux poisons qui font mourir, les italiens aux poisons qui font aimer.

LORD CHANDOS.

Le Fabiani alors est tout à la fois espagnol et italien. La reine est amoureuse et malade. Il lui a fait boire des deux.

LORD MONTAGU.

Ah çà, en réalité, est-il espagnol ou italien?

LORD CHANDOS.

Il paraît certain qu'il est né en Italie, dans la Capitanate, et qu'il a été élevé en Espagne. Il se prétend allié à une grande famille espagnole. Lord Clinton sait cela sur le bout du doigt.

LORD CLINTON.

Un aventurier. Ni espagnol, ni italien, encore moins anglais, Dieu merci! Ces hommes qui ne sont d'aucun pays n'ont point de pitié pour les pays quand ils sont puissants.

LORD MONTAGU.

Ne disiez-vous pas la reine malade, Chandos? Cela ne l'empêche pas de mener vie joyeuse avec son favori.

LORD CLINTON.

Vie joyeuse! vie joyeuse! Pendant que la reine rit, le peuple pleure, et le favori est gorgé. Il mange de l'argent et boit de l'or, cet homme! La reine lui a donné les biens de lord Talbot, du grand lord Talbot! La reine l'a fait comte de Clanbrassil et baron de Dinasmonddy, ce Fabiano Fabiani qui se dit de la famille espagnole de Peñalver, et qui en a menti! Il est pair d'Angleterre comme vous, Montagu, comme vous, Chandos, comme Stanley, comme Norfolk, comme moi, comme le roi! Il a la jarretière comme l'infant de Portugal, comme le roi de Danemark, comme Thomas Percy, septième comte de Northumberland! Et quel tyran que ce tyran qui nous gouverne de son lit! Jamais rien de si dur n'a pesé sur l'Angleterre. J'en ai Fourtant vu, moi qui suis vieux! Il y a soixante-dix potences neuves à Tyburn; les bûchers sont toujours braise et jamais cendre; la hache du bourreau est aiguisée tous les matins et ébréchée tous les soirs. Chaque jour c'est quelque grand gentilhomme qu'on abat. Avant-hier c'était Blantyre, hier Northcurry, aujourd'hui South-Reppo, demain Tyrconnel. La semaine prochaine ce sera vous, Chandos, et le mois prochain ce sera moi. Milords, milords, c'est une honte et c'est une impiété que toutes ces bonnes tètes anglaises tombent ainsi pour le plaisir d'on ne sait quel misérable

.

aventurier qui n'est même pas de ce pays! C'est une chose affreuse et insupportable de penser qu'un favori napolitain peut tirer autant de billots qu'il en veut de dessous le lit de cette reine! Ils mènent tous deux joyeuse vie, dites-vous. Par le ciel! c'est infâme! Ah! ils mènent joyeuse vie, les amoureux, pendant que le coupe-tête à leur porte fait des veuves et des orphelins! Oh! leur guitare italienne est trop accompagnée du bruit des chaines! Madame la reine! vous faites venir des chanteurs de la chapelle d'Avignon, vous avez tous les jours dans votre palais des comédies, des théâtres, des estrades pleines de musiciens. Pardieu, madame, moins de joie chez vous, s'il vous plait, et moins de deuil chez nous; moins de baladins ici, et moins de bourreaux là; moins de tréteaux à Westminster, et moins d'échafauds à Tyburn!

LORD MONTAGU.

Prenez garde. Nous sommes loyaux sujets, milord Clinton. Rien sur la reine, tout sur Fabiani.

SIMON RENARD, posant la main sur l'épaule de lord Clinton. Patience!

LORD CLINTON.

Patience! cela vous est facile à dire à vous, monsieur Simon Renard. Vous êtes bailli d'Amont en Franche-Comté, sujet de l'empereur et son légat à Londres. Vous représentez ici le prince d'Espagne, futur mari de la reine. Votre personne est sacrée pour le favori. Mais nous, c'est autre chose. - - Voyez-vous?

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