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CHAPITRE XI

RETOUR DE LA PROVENCE A L'OBÉISSANCE DU ROI.

1594-1595

1594

La noblesse et la ville d'Aix se déclarent pour le roi.
l'archevêque Génebrard.

tilités.

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Arrêt du Parlement ordonnant de rendre

la justice au nom de Henri IV. - Le duc d'Épernon continue les hosLettres du Parlement et du duc au roi. Convocation des États de l'union royaliste à Aix. - Le duc convoque les États épernon

-

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en Provence. Sa correspondance avec d'Épernon.

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Lesdiguières entre

-

Carcès sur

- Opérations de guerre. Mort de Besaudun. Le Parlement de Manosque revient à Aix. Mission de de Belloy en Provence. Surprise et démolition du fort Saint-Eutrope. - Conférences de Beaucaire. - D'Épernon traite avec le duc de Mayenne. - Réunion des États ligueurs à Marseille. Le duc d'Épernon fait ravager les environs de Toulon. prend Salon. - Carcès et le duc d'Épernon dans Salon. - Lesdiguières accourt au secours de Carcès. Le duc évacue Salon. Dufresne en Provence. - Arrivée du roi à Lyon. - Entrevue des députés du due avec lui. Révocation des pouvoirs du duc d'Épernon et nomination du duc de Guise au gouvernement de Provence. - Henri IV

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est absous par le pape. Plusieurs villes ligueuses quittent le parti
du duc. Boyer et Buous se rallient à l'union royaliste.
relations de Casaulx avec le roi d'Espagne.

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Premières

La Provence avait fait une plus douloureuse expérience des guerres civiles que toute autre province; elle se déclara une des premières du royaume pour Henri IV, cherchant la fin de ses maux sous son autorité et sa protection. Le 3 janvier 1593, les

gentilshommes présents à Aix se réunirent au couvent des Augustins, sous la présidence de Carcès, et délibérèrent à l'unanimité de reconnaître Henri IV comme roi légitime, de demander à ce prince l'oubli du passé, la confirmation des priviléges, coutumes et libertés de la province, l'exercice exclusif du culte catholique, « et d'aultant qu'ils avoient recognu que le duc << d'Espernon ne tendoit ses lacs que contre ceste province qu'il << vouloit entièrement engloutir et réduire sous sa tyrannique « domination, Sa Majesté seroit sur ce point singulièrement sol<< licitée de vouloir pourvoyr tel prince ou seigneur relevé que << bon luy semblera du gouvernement, autorisant et approuvant << tout ce qui s'estoit fait et passé contre le duc ». Deux jours après, veille de la fête des Rois, le conseil général des chefs de famille adopta par acclamations les résolutions de la noblesse.

Le lendemain, l'archevêque Génebrard profitant de la solennité de la fête des Rois, qui avait attiré un grand concours de fidèles à Saint-Sauveur, monta en chaire et invoqua les Écritures-Saintes pour prouver qu'en matière d'État aucune assemblée ne pouvait être faite sans que le chef de l'Église y fût appelé. Il prit texte de cette proposition pour attaquer les résolutions prises, prouva qu'on ne pouvait les exécuter sans l'assentiment du pape, et par ses déclamations factieuses chercha à faire naître une sédition. Mais le 7 janvier, les procureurs du pays ayant demandé au Parlement l'homologation des arrêtés pris par la noblesse et l'assemblée des chefs de famille, la Cour rendit un arrêt par lequel elle ordonnait à tous les habitants de la province d'obéir au roi, sous peine d'être punis comme perturbateurs du repos public, décidait que la justice serait rendue au nom de Henri IV, roi de France et de Navarre, faisait injonction à tous ceux qui tenaient le parti du duc d'Épernon de regagner leurs foyers avant huit jours, et frappait de la peine de bannissement l'archevêque Génebrard. Génebrard n'attendit pas qu'on sévit

contre lui; il s'enfuit d'Aix en compagnie de Pierre de Masparaulte, maître des requêtes, que le duc de Mayenne envoyait à Marseille pour y établir une chambre souveraine, et qui, arrêté et jeté en prison, venait d'être relâché depuis quelques jours.

L'arrêt rendu par le Parlement fut publié avec solennité. Les consuls, en chaperon et à cheval, suivis de l'assemblée des chefs de famille, parcoururent les rues au milieu d'une foule immense qui remplissait la ville de ses cris de joie. Chacun faisait l'éloge du roi; on vantait sa valeur, sa clémence, son oubli des choses passées; on disait que les villes soumises étaient les villes les plus heureuses, que la religion catholique y était maintenue et protégée, les prêtres honorés, que les garnisons en étaient éloignées et que l'abondance y régnait. La conversion du roi avait fait des prosélytes, et les grandes familles, si longtemps divisées par les croyances religieuses se rapprochaient et s'unissaient entre elles par les liens du mariage : le baron Scipion de Villeneuve se convertit à la foi catholique et épousa la fille du marquis de Trans, qui avait été un ardent ligueur; le farouche huguenot de Mirebel se maria avec la fille de son ennemi, le seigneur de la Berlière; les Tourretes, calvinistes convertis, s'unirent aux Villeneuve-Torenc, zélés catholiques de Saint-Paul. Dans toutes les classes de la société provençale des faits pareils se produisirent; les haines s'effaçaient, et le peuple, dans, son enthousiasme, saluait de ses vœux et de ses acclamations l'aurore d'un grand règne, qui apportait à une province si longtemps et si profondément troublée l'apaisement des passions et le retour à une paix sincère.

Le Parlement, qui avait à se faire pardonner, la noblesse, qui voulait déposer aux pieds du trône l'expression de son dévouement nouveau mais convaincu, le Tiers, qui continuait ses traditions de fidélité au roi, députèrent, le 2 mars, le consul Duperrier, le conseiller Joannis de Chateauvieux, le marquis de

Forbin-Janson et l'avocat de Fabrègues, pour prêter serment d'obéissance au roi et lui remettre les très-humbles doléances de la province. Le clergé se refusa à désigner un de ses membres pour faire partie de la députation, « prétendant témoigner « par là, dit Fabrègues, qu'il ne vouloit se séparer qu'à l'extré«mité de la Ligue ».

« Sire, disaient les Provençaux, vos très-humbles et très<< obéissants serviteurs protestent et déclarent qu'ils vous recon<<noissent pour leur naturel roy et souverain seigneur, et vous << supplient en toute humilité d'avoir pour agréable leur obeis«sance et fidélité. Ils désirent vous la continuer et employer « pour vostre service jusqu'à la dernière goutte de leur sang! « Si durant ces troubles et remuements, ils ne vous ont pas rendu << l'obeyssance due à Vostre Majesté, ils la supplient bien humble<<ment de croire qu'ils n'y ont esté poussés par aucun esprit de « rebellion, mais pour le seul zèle de la vraie religion, ayant tou<< jours esté leur intention de vous rendre les devoirs d'obeissance << aussitost qu'ils ont vu Vostre Majesté remise au giron de << l'Esglise. Que si pour raison des actions et desportements pas«sés, Vostre Majesté s'en estime offensée, il sera son bon plai«sir d'en esteindre et abolir la mémoire, même pour raison de « l'union et adhérence avec les princes et les villes de la Ligue, << pour la levée et la conduite des gens de guerre, pour imposi<«<tion des deniers, fabrication de monnoies..., etc., et généra«<lement de tout ce qui a esté fait, géré, négocié durant les << troubles et à l'occasion d'iceux depuis le jour des barricades << de Paris, sans permettre que par vos officiers ni autres en <«< soient faites aucunes poursuites ni recherches, civilement ni <«< criminellement, en façon que ce soit; d'ordonner à ceux qui << ont quitté la capitale de venir reprendre leurs séances à Aix; « de révoquer les lettres patentes par lesquelles le duc de << Mayenne establissoit dans la ville de Marseille une cour sou

« veraine, et de faire cesser les ravages et les désordres de la « province, qui sont tels et si estranges, que si Vostre Majesté « n'y pourvoit promptement, on ne peut attendre qu'une pro«< chaine ruyne et totale désolation de la province, à laquelle il « ne reste plus que la voix cassée et débile pour vous en faire << ses doléances. Et d'autant que ces désordres viennent en par<< tie de ce que le duc d'Espernon est gouverneur contre le gré << de la noblesse et de toute la province, plaise à Vostre Majesté « de pourvoir au dit gouvernement, tel autre que elle avisera, << qui soit catholique et qui ait l'autorité de conserver le pays en << vostre obeissance, et y restablir le repos tant désiré de tous « les gens de bien; de faire destruire les forts et citadelles bas<< tis par les sieurs de la Valette et d'Espernon, et spécialement << ceux bastis devant la ville d'Aix, attendu qu'ils altèrent la « fidélité du peuple par la méfiance qu'ils inspirent (1)................ »

Le voyage des députés dura quatre mois. Le roi les accueillit avec distinction; il les encouragea à résister au duc d'Épernon, et leur annonça qu'il avait donné l'ordre à Lesdiguières d'entrer en Provence avec des troupes pour contraindre le duc à sortir du pays. Il les pressa vivement de mettre tout en œuvre pour obtenir la réduction d'Arles et délivrer Marseille de la domination de Casaulx, et s'entretint plusieurs fois avec eux du mariage projeté du fils de la comtesse de Sault avec la fille de Lesdiguières.

La Ligue était expirante. Génebrard et Masparaulte essayèrent de la relever; mais ils ne parvinrent qu'à lui imprimer d'impuissantes convulsions. En quittant la ville d'Aix, ils s'étaient rendus à Berre et avaient gagné Marseille sur une galère. Casaulx et Louis d'Aix les reçurent avec les plus grands honneurs et firent tirer le canon en signe de réjouissance. Le lendemain, Masparaulte se rendit à un conseil de ville, où il déclara que le

(1) PAPON, t. IV, p. 346.

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