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l'exemple du travail et de l'assiduité, et se faisant remarquer par ses talents; l'acte public qui termina son cours en montra la solidité. L'Université entière et toutes les Facultés se réunirent pour cette solennelle épreuve. Les ducs Charles IV et François II, père et aïeul du défendant, y vinrent également avec toute la cour et beaucoup de nobles Lorrains. L'illustrissime François de Lorraine répondit à l'attente générale et, pour clore la séance, le P. Léonard Perrin, chancelier de l'Université, prononça un discours qui fut vivement applaudi.

Ensuite le Doyen de la Faculté de Théologie, se levant de son siège, fit la demande de la collation des grades académiques pour l'illustrissime et très digne candidat. Le chancelier accueillit la demande et félicita l'Université; puis, s'adressant au candidat, il le pria de faire sa profession de foi. Aussitôt le prince se mit à genoux devant le recteur et promit sur les Évangiles de garder toujours la foi catholique. Ensuite il alla s'agenouiller au milieu de la salle; et le chancelier, usant de la formule solennelle, le proclama successivement bachelier, licencié et docteur ès-arts et en philosophie; il lui remit ensuite tous les insignes du doctorat en philosophie : l'anneau, le livre, le bonnet carré surmonté d'une touffe de soie blanche, et le manteau de soie violette à bordure rouge. Le P. Christophe Mérigot, professeur de Rhétorique, remercia l'illustre assistance au nom de toute l'Université; puis on quitta la salle de théologie pour se rendre à l'église, toutes les Facultés faisant cortège à l'illustrissime prince. La cérémonie se termina par le chant du Te Deum 1. »

On connaît maintenant par quels et combien d'exercices devaient passer autrefois les élèves des Universités pour se former à la science sous la direction de leurs maîtres; on a vu l'ordre, la gradation, tout le plan de ces exercices, depuis les leçons du professeur, qui ouvrent à l'intelligence le champ de

'Documents inédits sur la Compagnie de Jésus. par le P, Carayon. Docum. V., p. 481.

ses opérations et lui fournissent la matière, qu'elle-même par son travail doit convertir en science, jusqu'aux thèses publiques et solennelles, qui démontrent le travail accompli et la science acquise. Niera-t-on qu'il y ait là un véritable système d'enseignement, une méthode nettement conçue et parfaitement ordonnée?

Ce n'est pas la méthode de notre époque. Elle fait, dit-on, une part trop large au syllogisme, à l'argumentation a priori, à toutes les arguties de la dialectique aristotélicienne. Aucune idée nouvelle n'en peut sortir, parce que l'intelligence s'y butte à des principes irréformables; c'est la méthode d'autorité, ce n'est pas une méthode de liberté. Or, ce qu'il nous faut à nous, c'est la liberté dans tout le domaine de la raison; voilà pour quoi notre siècle a répudié le vieux système d'enseignement et s'en est fait un à soi, qui a pour base l'observation, l'analyse et l'expérience, Nous l'estimons meilleur, nous ne reviendrons pas à l'ancien.

Soit; je ne discuterai pas la valeur de cette méthode nouvelle, elle a ses qualités et ses défauts, elle a aussi sa raison d'être, nous n'en disconvenons pas ; je n'essaierai même pas de montrer que les anciens ne l'ont point ignorée ni méconnue, et que, s'ils en ont fait usage beaucoup moins que nous, c'est uniquement que les sciences d'observation n'étaient pas nées pour ainsi dire de leur temps. Mais il me sera permis d'observer qu'une seule et même méthode ne convient pas à toutes les sciences; qu'il y a des sciences d'observation et d'expérience, comme les sciences physiques et naturelles, et qu'il y a aussi des sciences de raisonnement et de principes, comme les mathématiques, la métaphysique et la morale; que, si le raisonnement fondé sur des principes ne conduit à rien par lui seul dans le domaine des faits et des lois de la nature matérielle, le seul procédé analytique est de son côté impuissant à expliquer les faits du monde moral et à en établir les lois; que l'usage enfin presque exclusif de la méthode d'observation et d'analyse est plus fatal à la raison humaine que l'emploi immodéré du raisonnement et de la logique déductive, le propre de la raison étant non de se mouvoir dans les faits particuliers et contingents, mais de s'élever aux lois générales qui les régissent,

aux principes universels, immuables, dont les faits ne sont que la conséquence et la manifestation.

Aussi avons-nous le droit de regretter que, dans nos Universités actuelles, on ait à ce point sacrifié la méthode ancienne à des préjugés irrationnels et à l'engouement né, il y a deux siècles, de l'humanisme et des découvertes scientifiques'. Il y a place, croyons-nous, dans l'esprit humain, pour toutes les sciences, pour la philosophie, la théologie et le droit, sciences de principes et de raisonnement, comme pour la physique, la chimie, l'histoire naturelle, etc., sciences de phénomènes et, par conséquent, d'observation et d'analyse. C'est pourquoi

1 On lisait dernièrement dans la Revue chrétienne, à propos de la reconstitution projetée des Universités régionales: « L'Université moderne, telle qu'elle s'est développée dans les pays germaniques, en Suisse, en Allemagne, en Hollande, en Angleterre, aux États-Unis, cette nouvelle espèce d'Universités qui date du xvre siècle, est la fille authentique de l'esprit protestant, fille majeure et libre sans nul doute, qui n'est d'humeur à accepter aucune tutelle, mais n'en a pas moins une affinité secrète avec l'inspiration religieuse qui l'a fait naître et lui a permis de se développer. La science libre correspond à la religion libre. Les principes religieux ont une logique obscure qui se fait sentir jusque dans les questions les plus éloignées d'eux, en apparence. Relisez avec soin les circulaires de M. Buisson, les articles de la Revue pédagogique, les programmes de l'enseignement primaire, le dernier livre de M. Liard sur nos futures Universités, vous reconnaitrez aisément dans les mobiles qui dictent ces réformes, dans la direction qu'elles prennent, dans la manière évolutive dont elles se font, je ne sais quelle influence secrète, inconsciente peut-être, mais certaine de l'esprit et des méthodes du protestantisme. « (Revue chrétienne, octobre 1890: Nos Facultés et les futures Universités).

M. Sabatier voit juste, et ce qu'il dit ne manque pas d'exactitude. La librepensée actuelle est fille très légitime du protestantisme c'est un honneur que nous, catholiques, nous ne disputerons certainement pas à nos frères séparés aux fruits on reconnait l'arbre. Mais ce qui étonne, c'est de voir avec quelle facilité « cette nouvelle espèce d'Universités, fille authentique de l'esprit protestant », réussit à s'implanter jusque dans les pays catholiques. Que les Universités soumises à des gouvernements plus libéraux que chrétiens se soient moulées dans la forme de la libre-pensée protestante, à cela rien de bien surprenant; mais qu'ailleurs, où l'on prétend, non sans droit, être chrétien avant tout, les Universités dites catholiques ne soient dans leur constitution, leur programme et leurs méthodes d'enseignement, que des copies plus ou moins complètes de ce qui existe en Allemagne, au lieu de faire revivre parmi nous les traditions de six siècles, glorieux pour l'Église et prospères pour les sciences, voilà, il le faut avouer, qui dénote un regrettable oubli de ce que furent autrefois les Universités, filles authentiques de l'esprit catholique.

nous aspirons à reprendre les meilleures traditions de nos pères. à restituer ses droits à la philosophie dans nos Universités, comme préparation nécessaire aux autres sciences, sans refuser rien à celles-ci de ce qui leur est propre.

Connaître les faits et les lois de la nature matérielle est bon. est indispensable à la science; mais combien plus nécessaire encore et bien meilleur n'est-il pas de savoir sur quels principes est fondée la naturelle spirituelle et raisonnable! Or, aujourd'hui, les faits abondent, mais les principes nous manquent; il est temps d'y revenir.

A. DECHEVRENS, S. J.

UN PÈLERINAGE A NOTRE-DAME D'HÉAS

(NOTES DE VOYAGE)

(Troisième article

V. Gavarnie'

Mardi, 8 août.

-Ce matin, excursion à travers le cirque. Le soleil est radieux; la lumière se joue sur les glaciers du Marboré et dans les eaux étincelantes de la célèbre cascade, « beau voile aérien aux ondulations si gracieuses.

་་

La chute

est de quatre cents mètres. Ceux qui n'ont pas vu le cirque de Gavarnie ne s'en feront jamais qu'une idée très imparfaite. Ceux qui l'ont vu seulement d'en bas, du sol, n'en soupçonnent ni la prodigieuse immensité, ni la magnificence sublime. Pour l'admirer dans sa beauté incomparable, il faut le contempler du sommet du Pimené. Le Pimené est ce pic escarpé qui se dresse à l'entrée du cirque, à gauche.

- Voici le Pimené, dit Raoul, regardez-le bien, mon cher Paul; il a été le théâtre d'un des brillants exploits du signor Stanco.

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