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LE VOYAGEUR.

LE VIELLIARD.

Prends mon bras, car un long voyage
Endolorit tes pieds poudreux.

Comme toi j'errais à ton âge.

Dieu t'offre un ami; sois heureux.

LE VOYAGEUR.

Quand j'invoquai dans la tempête
Ce Dieu qu'on dit si consolant,
Les poignards levés sur ma tête
Portaient gravé son nom sanglant.

LE VIEILLARD.

Te voici dans mon ermitage;
Versons-nous d'un vin généreux.
Hélas! mon fils aurait ton âge.
Dieu t'offre un ami; sois heureux.

LE VOYAGEUR.

Non, il n'est point d'Être suprême
Qui seul peuple l'immensité,
Et cet univers n'est lui-même
Qu'une grande inutilité.

LE VIEILLARD.

Vois ma fille, à qui ta détresse
Arrache un soupir douloureux;

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LE VOYAGEUR.

Elle a consolé ma veillesse.

Dieu t'offre un ami; sois heureux.

LE VOYAGEUR.

Dans cette nuit profonde et triste
Ce Dieu vient-il guider nos pas?
Eh! qu'importe enfin qu'il existe,
Si pour lui nous n'existons pas?

LE VIEILLARD.

Voici ta couche et ta demeure :
Chasse tes rêves ténébreux.
Tiens-moi lieu du fils que je pleure.
Dieu t'offre un ami; sois heureux.

L'étranger reste; il plaît, il aime,
Et de fleurs bientôt couronné,
Époux et père, il va lui-même
Dire à plus d'un infortuné :
«Le sort est injuste sans doute,
Mais n'est pas toujours rigoureux.
Dieu qui m'a placé sur ta route,
Dieu t'offre un ami; sois heureux. »

OCTAVIE.

1823.

AIR des Comédiens.

Viens parmi nous, qui brillons de jeunesse,
Prendre un amant, mais couronné de fleurs.
Viens sous l'ombrage, où, libre avec ivresse,
La volupté seule a versé des pleurs.

Ainsi parlaient des enfants de l'empire
A la beauté dont Tibère est charmé.
Quoi! disaient-ils, la colombe soupire
Au nid sanglant du vautour affamé!

Belle Octavie! à tes fêtes splendides,
Dis-nous, la joie a-t-elle jamais lui?
Ton char, traîné par six coursiers rapides,
Laisse trop loin les Amours après lui.

Sur un vieux maître, aux Romains qu'elle outrage,

Tant d'opulence annonce ton crédit ;

Mais sous la pourpre on sent ton esclavage;

Et, tu le sais, l'esclavage enlaidit.

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OCTAVIE.

Marche aux accords des lyres parasites;
Que par les grands tes vœux soient épiés.
Déjà, dit-on, nos prêtres hypocrites
Ont de leurs dieux mis l'encens à tes pieds.

Mais à la cour lis sur tous les visages, Traîtres, flatteurs, meurtriers, vils faquins. D'impurs ruisseaux, gonflés par nos orages, Font déborder cet égout des Tarquins.

Tendre Octavie, ici rien n'effarouche
Le dieu qui cède à qui mieux le ressent.
Ne livre plus les roses de ta bouche
Aux baisers morts d'un fantôme impuissant.

Viens parmi nous, qui brillons de jeunesse, Prendre un amant, mais couronné de fleurs; Viens sous l'ombrage, où, libre avec ivresse, La Volupté seule a versé des pleurs.

Accours ici purifier tes charmes :
Les délateurs respectent nos loisirs.
Tous à leur prince ont prédit que nos armes
Se rouilleraient à l'ombre des plaisirs.

Sur les coussins où la douleur l'enchaîne,
Quel mal, dis-tu, vous fait ce roi des rois?

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