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être fondu qu'en petite quantité au chalumeau à hydrogène et oxygène. C'est le plus réfractaire de tous les métaux que l'on peut soumettre à l'action directe de la flamme oxhydrique. Le plus souvent, ce qu'on a fondu comme iridium était un alliage de ce métal avec les autres métaux du platine. Ajoutons que, récemment, Deville et son collaborateur ont reproduit par synthèse le platine ferrifère non magnétique, le sulfure de ruthénium ou laurite et les osmiures de compositions diverses, en fondant, en présence de la pyrite à haute température, le platine, le ruthénium, ou un mélange d'osmium et d'iridium à proportions variables.

Il est peu de métaux sur lesquels Henri Sainte-Claire Deville n'ait fait d'originales et utiles observations. C'est depuis le travail qu'il a fait avec Caron sur le magnésium et sa préparation, que ce métal est devenu usuel; les propriétés remarquables du nickel et du cobalt ne sont connues que depuis qu'il a indiqué le moyen de les fondre à l'état de pureté, etc. Nous n'insisterons pas longtemps sur cet ensemble considérable des travaux qui ont nécessité la mise en œuvre de méthodes nouvelles et en particulier de moyens spéciaux de prcduire de hautes températures.

Pour les métaux réfractaires tels que le manganèse, le chrome, le nickel, le cobalt et le platine, il suffit de foyers chauffés au charbon et à l'air forcé, mais à la condition d'employer des creusets appropriés, n'apportant au métal aucune impureté. Ces creusets sont en chaux ou en magnésie; ils purifient le métal du silicium ou des autres substances acidifiables qu'ils peuvent contenir. Deville a obtenu ainsi le nickel et le cobalt, malléables, avec une ténacité bien supérieure à celle du fer lui-même.

Pour des matières comme le quartz et le bore, il a employé les creusets en charbon de cornue, matière absolument infusible aux températures que nous produisons et facile à protéger contre l'action oxydante des foyers.

Mais c'est surtout dans les travaux sur le platine et les métaux congénères, que ces moyens de chauffage ont acquis leur puissance maxima. Il suffira de rappeler que la commission du mètre a pu, en 1874, à l'aide de ces procédés fondre d'un seul coup 250 kilog. de platine iridié, encore plus difficile à fondre que le platine pur (1).

La reproduction des espèces minérales occupe une large place dans l'œuvre scientifique de Deville. On lui doit surtout plusieurs méthodes générales absolument nouvelles.

En soumettant de l'acide borique fondu à l'action des vapeurs du fluorure d'aluminium dans des vases en charbon de cornue fortement chauffés, Deville et Caron ont obtenu le corindon blanc (2), le rubis, le saphir oriental, l'émeraude orientale ou corindon vert, en ajoutant aux matières principales des quantités variables de fluorure de chrome.

(1) On peut encore citer, dans cet ordre de recherches, les travaux de Deville sur l'emploi du pétrole ou plutôt des huiles lourdes, comme combustible pouvant servir à la fusion des métaux au four à réverbère et au chauffage des chaudières à vapeur, des machines, des bateaux ou des locomotives.

(2) Il se forme de l'alumine cristallisée et du fluorure de bo:c gazeux.

Le fer oxydulé, le cymophane, la gahnite, le zircon, la staurotide (exempte de fer) ont été obtenus par cette intéressante méthode.

Il a donné également avec Caron un nouveau mode de préparation de l'apatite (chlorofluo-phosphate de chaux hexagonal), qui consiste à fondre du phosphate de chaux amorphe dans un creuset de charbon avec du fluorure ou du chlorure de calcium on obtient par cette méthode, non seulement l'apatite en cristaux très nets, mais aussi les composés correspondants de la baryte et de la strontiane, qui ont également la forme hexagonale.

En substituant au chlorure ou fluorure de calcium le sel correspondant de magnésium, on obtient une autre espèce naturelle, la wagnerite, qui est le type d'une nouvelle série de composés dans lesquels peuvent entrer tous les oxydes du groupe magnésien.

Citons encore un important mémoire sur les sulfures mé talliques (pyrite de fer, pyrite cuivreuse, argent sulfuré, blende ordinaire ou hexagonale, greenockite, etc.), qu'il a publié avec un autre de ses élèves, M. Troost; quelques notes sur l'argent ioduré, l'argent bromuré, la lévyne, la phillipsite, etc., et nous arrivons à la plus originale des méthodes mises en œuvre par Deville dans ses recherches minéralogiques.

Si l'on fait passer sur un oxyde métallique le sesquioxyde de fer amorphe, par exemple, chauffé au rouge, un courant extrêmement lent d'acide chlorhydrique gazeux, l'oxyde cristallise peu à peu et, dans le cas particulier qui nous occupe, prend toutes les apparences du fer oligiste de l'île d'Elbe. Il semble que l'acide chlorhydrique n'intervienne ici que par sa présence, modifiant moléculairement les substances qu'il rencontre, sans s'y combiner en partie.

L'oxyde d'étain, en prismes à base carrée avec toutes les formes de l'étain des filons, l'acide titanique en cristaux à base carrée, la magnésie (périclase), l'oxyde vert de manganèse, ont été obtenus de la même manière.

L'acide chlorhydrique peut donc être considéré comme un agent minéralisateur; mais ce n'est point le seul gaz qui puisse remplir ce rôle important; tous les éléments gazeux de nos émanations actuelles, l'hydrogène, l'hydrogène sulfuré, l'acide fluosilicique (1), peuvent, comme l'acide chlorhydrique, déterminer la formation et opérer le transport d'un grand nombre de minéraux de nos filons.

α

<< Certainement (dit Deville), si j'avais voulu, au début de « mes expériences, considérer tous ces phénomènes comme dus à ce que l'on appelle une action de présence, en rap<< porter la cause à la force catalytique, dont l'emploi est si << commode parce que sa définition est aussi élastique qu'on « le veut, je n'aurais pas été contredit (2). »

Mais, comme nous l'avons déjà dit, Deville ne s'est jamais contenté de ces explications vagues; il a cherché longtemps

(1) M. Hautefeuille a ajouté depuis l'acide fluorhydrique à la liste de ces éléments gazeux.

(2) Leçon sur la dissociation professée à la Société chimique, p. 352, 1866.

l'explication de ces phénomènes qui lui a été apportée depuis par sa découverte de la dissociation (1).

Je citerai, comme appartenant au même ordre d'idées, le travail où Deville et M. Debray ont utilisé les variations de solu bilité d'un grand nombre des composés minéraux, dans des milieux appropriés, pour les obtenir à l'état cristallisé. La plupart des carbonates, sulfures et autres composés réputés insolubles ont été ainsi transformés en cristaux sans qu'il ait été nécessaire d'avoir recours à des températures supérieures à 100.

Mais nous avons hâte d'arriver aux travaux de Henri SainteClaire Deville, qui se rapportent à la chimie générale. Son mémoire « sur les densités de vapeurs à haute température », exécuté en collaboration avec M. Troost, fait époque dans l'histoire de la détermination si importante des densités de vapeurs. Leur méthode, originale à plus d'un titre, complète heureusement celle de M. Dumas. Elle est employée aujourd'hui dans tous les laboratoires de recherches à la détermination de la densité de vapeurs des substances peu volatiles, vaporisables sans décomposition de 350 degrés à 1400 degrés. Les densités réelles du soufre, du sélénium, du tellure et des métaux volatils, tels que le cadmiun et le zinc, peuvent être maintenant déterminées dans des ballons de porcelaine aussi facilement que l'avait été celle de l'eau dans un ballon de verre.

On sait comment les anomalies que l'on croyait exister dans la composition des acides hydrogénés de la famille du soufre ont disparu à la suite de ces importantes déterminations qui n'ont pas fait disparaître toutefois les anomalies relatives à la vapeur du phosphore et de l'arsenic.

Leurs appareils à vapeur de mercure et de soufre, d'un emploi très commode, servent aujourd'hui couramment pour l'étude de tous les phénomènes que l'on veut étudier à une température fixe et déterminée. Tels sont, par exemple, les phénomènes de dissociation qui exigent des températures invariables longtemps maintenues, très difficiles à obtenir par toute autre méthode.

Nous passons sous silence bien d'autres travaux de Deville, intéressants à divers titres, et nous arrivons à la découverte capitale de la dissociation.

La théorie de la dissociation est sans contredit sa plus belle découverte. Il n'est pas inutile de rappeler comment elle s'est fait jour dans son esprit avant de prendre place parmi les vérités scientifiquement démontrées.

La combinaison de l'hydrogène et de l'oxygène donne de l'eau en même temps qu'un énorme dégagement de chaleur capable de fondre le platine. Cependant Grove démontre qu'à une température inférieure à celle de sa fusion, le platine plongé brusquement dans l'eau la décompose en ses éléments hydrogène et oxygène, sans éprouver lui-même d'altération. On expliquait à cette époque l'expérience de Grove par un effet spécial du platine, une force catalytique. Mais pour Henri Sainte-Claire Deville, qui n'a jamais accepté

(1) Leçon sur la dissociation professée à la Société chimique,

p. 345.

dans son enseignement cette idée de forces occultes, une telle explication n'était que l'aveu de l'impuissance où l'on était d'assigner à ce phénomène sa véritable cause.

D'un autre côté, il remarquait que la combinaison des corps, en dégageant de la chaleur, donne naissance à un produit différent par ses propriétés de ses composants et dont il contient cependant toute la partie pondérable. C'était pour lui un changement d'état comparable à celui qui se manifeste quand la vapeur d'eau passe à l'état d'eau liquide en abandonnant une quantité considérable de chaleur. 11 devait donc y avoir un rapprochement nécessaire entre ces deux ordres de phénomènes considérés alors comme absolument distincts.

Pour rester dans l'exemple choisi, remarquons avec lui que l'eau, liquide à la température ordinaire, émet des vapeurs dont la tension varie avec la température et croît avec elle. De même, la vapeur d'eau chauffée au delà d'une certaine température doit se décomposer partiellement en ses éléments, et en proportion d'autant plus forte que la température s'élève.

Pour une température donnée, la décomposition serait limitée, de même que la vaporisation de l'eau ; il y aurait, en un mot, une tension de dissociation qui limiterait le phénomène de la décomposition de l'eau, comparable à la tension de vaporisation qui limite la production de la vapeur. En élevant suffisamment la température, on arriverait à décomposer totalement l'eau, comme on arrive à vaporiser complètement ce corps. Dans certaines limites de température, la vapeur d'eau doit donc exister dans un état de décomposition variable qui augmente si l'on chauffe davantage, ou qui diminue jusqu'à cesser quand on abaisse suffisamment la température. C'est cet état variable qu'il a désigné sous le nom de dissociation. Ce mode de décomposition partielle, en complète opposition avec les idées reçues alors (1), explique facilement l'expérience de Grove; mais il fallait en démontrer la réalité : c'est ce qu'il a fait, non seulement pour l'eau, mais encore pour l'acide carbonique, l'oxyde de carbone et pour bien d'autres composés. Nous regrettons de ne pouvoir décrire ici les ingénieuses et délicates méthodes à l'aide desquelles il a constaté ce groupement mobile des éléments de ces corps, soumis à l'influence des hautes températures.

Nous ne décrirons pas davantage celles qui ont été effectuées dans son laboratoire par ses élèves, MM. Debray, Troost, Hautefeuille, Isambert et Ditte, qui ont contribué aussi pour leur part à préciser et à développer la théorie de la dissociation, nous voulons seulement en indiquer quelques applications, puis en montrer toute la portée et toute la généralité.

L'acide sulfhydrique en excès chasse l'acide carbonique des dissolutions de carbonates alcalins, et inversement l'acide carbonique chasse, s'il est également en quantité suffisante, l'acide sulfhydrique des sulfures. Ces phénomènes in verses, attribués autrefois à l'action de masse, reçoivent

(1) On admettait sans preuves que chaque corps avait une température fixe de décomposition.

aujourd'hui une explication complète des lois établies par Deville. « Quand on fait passer de l'hydrogène sulfuré dans une solution de carbonate de potasse placée dans un flacon, le gaz s'y dissout d'abord, puis forme une atmosphère plus ou moins pure à la surface du liquide. L'acide carbonique dissous peut se diffuser dans cette atmosphère; il est donc volatil dans l'acide sulfhydrique et par suite des lois de Berthollet, il doit être déplacé par ce dernier, et cela d'autant plus énergiquement que la tension de l'hydrogène sulfuré est plus grande dans le mélange gazeux qui est placé au-dessus du liquide, c'est-à-dire que le courant d'acide sulfhydrique a été plus longtemps continué. On peut dire que l'acide sulfhydrique dissous est fixe dans un milieu composé de sa propre substance et que l'acide carbonique y est volatil; donc à la fin celui-ci devra être chassé par un acide fixe.

« Le même raisonnement fera voir que l'acide carbonique traversant une solution de sulfure de potassium le décomposera à la longue en formant au-dessus de la liqueur une atmosphère dans laquelle l'acide sulfhydrique pourra se diffuser ou se volatiliser, tandis que l'acide carbonique deviendra relativement fixe, et l'intensité d'action de ce dernier sera d'autant plus grande que sa tension sera plus considérable dans le mélange gazeux qui est en contact avec la surface du liquide. Je crois qu'on fait disparaître ainsi complètement la partie mystérieuse de ces phénomènes de masse (1). »

La même nature d'explication s'applique à bien d'autres réactions du même genre. Ce sont maintenant des faits trop connus pour qu'il soit nécessaire d'y insister plus longtemps.

Je n'insisterai pas davantage, et pour la même raison, sur la lumière que la théorie de la dissociation a jetée sur la constitution de certaines vapeurs complexes, sur les températures de combustion et sur bien d'autres phénomènes. Je parlerai seulement de son application à quelques-uns des grands phénomènes de la nature.

Si l'atmosphère ne contient qu'une quantité à peu près constante d'acide carbonique, comme l'a démontré récemment M. Reiset (3 dix millièmes environ du volume), cela tient à l'état de dissociation du bicarbonate de chaux, contenu dans la masse énorme d'eaux douces ou salées qui couvrent une partie considérable de notre globe.

Toute diminution dans la quantité d'acide carbonique de l'atmosphère est immédiatement compensée par une décomposition du bicarbonate de chaux, et celle-ci s'arrête quand la pression de l'acide carbonique atmosphérique a pris une valeur en rapport avec la température des lieux où s'opère le phénomène. Une augmentation notable, au contraire, entrainerait rapidement la dissolution d'une portion plus grande du carbonate de chaux du sol et sa transformation en bicarbonate avec rétablissement de la pression normale.

L'Océan devient donc un régulateur de la proportion de l'acide carbonique contenu dans l'atmosphère, grâce au jeu naturel de la dissociation, comme l'a montré récemment. M. Schlæsing.

(1) Leçons sur la dissociation, p. 339 et 340.

La respiration des animaux met aussi en jeu ce phénoinène. Le bicarbonate alcalin du sang, séparé seulement par une membrane de l'air introduit dans le poumon par le jeu de la respiration, se dissocie jusqu'au moment où cet air devient assez riche en acide carbonique pour limiter sa décomposition, qui s'effectue à travers les membranes à peu près comme elle le ferait à l'air libre. Cet air, singulièrement enrichi en acide carbonique, est expulsé, puis remplacé par celui de l'atmosphère, où la décomposition des bicarbonates recommence sans jamais s'épuiser, puisque le jeu naturel de l'organisme durant la vie est de produire dans la profondeur des tissus de l'acide carbonique qui passe à l'état de bicarbonates.

C'est à M. P. Bert qu'on doit cette remarquable application de la dissociation aux phénomènes de la vie.

Mais le mécanisme de la dissociation s'étend au delà du monde où nous vivons.

Nous savons que le soleil contient la plupart des éléments des combinaisons terrestres. Sans pouvoir préciser la température à laquelle ces éléments y sont portés, nous pouvons dire qu'elle dépasse tellement celles que nous produisons dans nos laboratoires, qu'on doit y supposer tous les corps possibles à l'état de dissociation très avancée, s'ils ne sont pas complètement décomposés. Si donc aucune cause extérieure ne vient réchauffer le soleil, cet astre devra se refroidir; mais son refroidissement ne s'effectuera pas comme celui d'un corps solide incandescent qui rayonnerait de toutes parts sa chaleur. Il contient en puissance une provision incalculable de chaleur, qui se manifestera successivement, au fur et à mesure que, par une perte de sa chaleur actuelle, les combinaisons réalisables entre les éléments séparés s'effectueront. La dissociation de ces éléments deviendra, si l'on veut, de moins en moins complète, mais en fournissant d'énormes quantités de chaleur qui répareront successivement la chaleur perdue.

Ce qui se passe dans le refroidissement du soleil peut être comparé à ce qui se produirait, par exemple, si une masse considérable de vapeur d'eau à 100 degrés et maintenue à la pression constante de 760 millimètres venait à se refroidir par rayonnement ou par toute autre cause; sa température resterait invariable, tant que la vapeur tout entière ne se serait point condensée en liquide à 100 degrés. Elle n'arriverait à cet état qu'après avoir dépensé, perdu, ce que l'on appelle encore aujourd'hui sa chaleur latente de vaporisation.

:

M. Lockyer va même plus loin à la température solaire, les corps élémentaires que nous connaissons, métaux ou métalloïdes, seraient eux-mêmes décomposés en d'autres corps plus simples qui seraient les véritables éléments, la matière. pondérable de l'univers. La quantité de chaleur en puissance dans le soleil comprendrait donc en outre la chaleur de décomposition des corps que nous désignons actuellement sous le nom de corps simples. Mais que cette source de chaleur latente existe ou n'existe pas, le phénomène général reste le même, et c'est toujours dans la dissociation qu'il faut chercher un régulateur (peut-être le seul) de la chaleur

solaire, un moyen simple utilisé par la nature pour maintenir dans une période de temps, difficile à calculer, la constance de sa température et de sa radiation.

Assurément, il reste encore plus d'un point à étudier dans tous les phénomènes dépendant de la dissociation; les nombreux problèmes qu'ils soulèvent sont plus tôt posés que résolus; mais leur importance est telle, que ce sera dans l'avenir une grande gloire pour Deville que d'avoir contribué à les poser et à les élucider.

Les résultats scientifiques purement pratiques, de même que les théories, perdent singulièrement de leur importance avec íe temps; le progrès incessant des sciences nous amène à mieux connaître et à mieux interpréter les faits, et nous découvre des perspectives que les théories, toujours incomplètes, n'avaient pas fait soupçonner. Ce n'est qu'en nous reportant dans le milieu où nos prédécesseurs ont vécu, en adoptant pour un instant leurs idées, s'il est possible, que nous parvenons à nous rendre compte du mérite de leurs conceptions et de la valeur de leurs travaux.

Les lois naturelles, au contraire, ont tout à gagner du temps, parce qu'il en étend les applications et en augmente par conséquent chaque jour l'importance. C'est pour cela que le nom de Deville n'a, dans l'avenir, rien à craindre de l'oubli (1).

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lorsque deux conditions auront été remplies, lorsque, d'une part, les conséquences physiologiques de ce mode d'intervention seront bien établies et que, d'autre part, on aura déterminé dans quel cas et jusqu'à quel point elle peut être utile.

C'est la dernière question que nous ayons à résoudre et elle n'est pas la moins importante. Les conditions dans lesquelles on a eu recours à cette opération sont tellement multiples que l'expérimentation ne saurait intervenir pour résoudre tous les problèmes cliniques ainsi soulevés. Ainsi pour prendre un exemple, elle ne peut évidemment nous fournir aucune donnée sur l'emploi de la transfusion dans l'aliénation mentale, préconisé par certains médecins italiens.

D'autre part, je sais bien que les résultats des expériences de saignées et de transfusions faites sur des animaux ne peuvent s'appliquer d'une manière rigoureuse à l'homme. Mais il ne faut pas vous attacher aux questions de doses et de résistance individuelle et ici, comme dans toutes les études de thérapeutique expérimentale, nous ne devons pas oublier que les faits physiologiques sont soumis chez les animaux et chez l'homme à des lois communes.

Or ce sont les faits d'ordre physiologique qui ont dû nous préoccuper avant tout.

Les anémies d'origine expérimentale nous fournissent un excellent terrain pour étudier les avantages de la transfusion.

Prenons le cas où ce genre d'intervention paraît le mieux indiqué, les hémorragies profuses menaçant l'existence. De ce que, dans un cas en apparence désespéré, cette opération a été suivie de guérison ou d'une amélioration soutenue, on ne peut avec certitude en conclure que le résultat obtenu soit le fait de la transfusion.

A quel criterium, en effet, reconnaître que le malade était perdu sans ressource au moment où la transfusion a été pratiquée, et de quel droit pouvons-nous rapporter à cette opération le bénéfice d'une guérison qui se fût peut-être produite par les seules forces de la nature ?

De même dans les anémies chroniques, comment établir, sans le secours de l'étude des modifications dans l'évolution et dans la constitution du sang, le résultat obtenu par la transfusion?

L'expérimentation me semble donc pouvoir répondre aux deux questions principales qui se posent ici et que nous formulerons dans les termes suivants :

1o La transfusion est-elle utile dans les cas d'anémie aiguë, lorsque la perte du sang met la vie en danger, ou mieux encore lorsqu'il y a mort imminente?

Dans le cas de réponse affirmative, à quel mode de transfusion doit-on donner la préférence?

2o La transfusion est-elle utile dans les cas d'anémie chronique?

A cette dernière question nous répondrons en énonçant les conclusions des expériences que nous vous avons exposées.

Au contraire, pour résoudre la première, il est nécessaire

de compléter notre étude expérimentale sur ce point spécial, assez important pour qu'on y revienne en détail.

Ici, il nous faut faire appel aux notions que nous avons acquises en étudiant les pertes de sang mortelles. Aujourd'hui très nombreuses sont les expériences où il est dit que les animaux saignés à mort sont revenus à la vie, grâce à la transfusion. Quelle foi faut-il accorder à ces faits de prétendue résurrection? C'est ce qu'il importe de discuter.

Nous avons vu que les animaux et l'homme peuvent perdre une quantité relativement très considérable de sang, avoir une syncope prolongée, se trouver en état de mort apparente et cependant revenir à la santé, sans aucune intervention. Dans ces cas, ce qu'il reste de sang dans l'organisme suffit pour l'entretien de la vie, jusqu'à ce qu'une poussée de nouveaux globules rétablisse définitivement l'équilibre sanguin. On peut donc se demander si tous les faits de résurrection par la transfusion sont bien imputables à cette opération.

D'un autre côté, si la transfusion n'intervient que pour faciliter la rénovation sanguine, son utilité devient discutable; et dès lors, en raison des difficultés qu'elle présente dans ces cas, il est malaisé d'affirmer qu'elle soit formellement indiquée.

Aussi, pour démontrer expérimentalement que la transfusion est utile dans l'anémie aiguë, qu'elle peut empêcher une mort imminente, il faut chercher tout d'abord à l'aide de quels signes on reconnaîtra qu'un animal doit forcément succomber à une hémorragie. Si, au moment où ces symptômes se produisent, l'injection de sang nouveau assure son rétablissement, la preuve sera faite de l'utilité de la transfusion dans ces circonstances.

Cette question préjudicielle ne semble avoir en aucune façon préoccupé les expérimentateurs. Or supposons le cas le plus simple, une hémorrhagie abondante chez un animal d'ailleurs sain. Vous connaissez tous les phénomènes, d'ailleurs variables, que l'on constate. En est-il un qui puisse servir de criterium d'une mort imminente? A cet égard, nous ne trouvons que dans un travail de M. Paul Bert une indication sur ce point. Après avoir passé en revue les phénomènes qui précèdent la mort, il montre que tous peuvent s'observer sans que la mort soit inévitable, tous, à l'exception d'un seul, les grandes convulsions. Chaque fois que ces dernières manifestations se produisent, le dénouement fatal est, d'après lui, certain.

Les faits que nous avons recueillis viennent à l'appui de cette manière de voir. Si quelques-uns de nos animaux ont succombé sans présenter de grandes convulsions, tous ceux qui ont présenté ces phénomènes sont morts.

Nous avons déjà décrit les grandes convulsions à propos de la mort par hémorragie. Revenons ici sur quelques particularités qu'elles présentent.

Le plus souvent, ces convulsions se montrent dans le cours même de la saignée, surtout si le sang coule bien et rapidement. Habituellement, ainsi que l'a vu M. Bert, dès qu'elles apparaissent, l'animal est condamné, alors même qu'on arrête l'hémorragie. Elles ont donc une signification précise, 3e SÉRIE. - REVUE SCIENTIFIQUE. - XX'X.

bien que, dans certains cas exceptionnels, les chiens soient morts sans présenter de convulsions.

Il faut éliminer de ces cas ceux dans lesquels les animaux sont restés attachés; ce qui est arrivé dans plusieurs de nos expériences qui n'avaient pas pour but de mettre en évidence les symptômes des hémorragies. Dans ces circonstances les convulsions ont pu se produire sans être remarquées, et il faut avoir soin, quand on veut poursuivre ces recherches, de détacher les animaux dès qu'après la première période d'agitation survient celle de résolution.

Dans quelques cas, l'hémorragie s'arrête avant les convulsions; le sang ne coulant plus, on débouche la canule; cette manœuvre demeurant sans effet, on retire cet instrument, et parfois l'artère reste béante sans que le sang coule de nouveau. Le plus souvent, au contraire, au bout de quelques instants, la circulation redevient plus active, et il se produit une nouvelle hémorragie qui conduit aux grandes convulsions. De même, si on ouvre un autre vaisseau, celles-ci apparaissent et la mort ne tarde pas à survenir.

Mais lorsqu'on a tiré tout le sang qu'on peut extraire d'un seul vaisseau, il arrive parfois que le chien reste en résolution, l'hémorragie paraît arrêtée; on lie le vaisseau, et l'animal succombe tardivement. C'est ce qui s'est produit dans une des expériences faites antérieurement devant vous, à propos des symptômes des hémorragies, et que nous rapporterons ici.

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Saignée par la fémorale droite. Le sang sort avec une lenteur relative, l'artère étant petite. Le chien s'agite et s'essouffle vers 250 centimètres cubes, puis l'hémorragie s'arrête vers 300 centimètres cubes; l'animal urine, paraît affaissé ; il n'a pas de convulsions.

On ouvre la fémorale gauche; on obtient environ 75 centimètres cubes de sang qui sort goutte à goutte. Affaissement plus grand. Défécation. Pas de convulsions. Le chien a perdu environ 1/18 du poids du corps.

La température rectale prise trois quarts d'heure après la saignée est de 36o,5.

Le lendemain, on trouve l'animal mort dans sa niche. Ce chien n'ayant pas succombé sous nos yeux, on peut se demander s'il n'a pas eu de convulsions terminales. Mais, dans d'autres expériences, nous avons vu mourir des chiens sans qu'ils eussent présenté de convulsions. La mort peut donc exceptionnellement survenir sans accidents de cet ordre.

Mais ce fait ne retire rien à la valeur qu'on doit attribuer aux grandes convulsions lorsqu'elles se produisent, ce qui est le cas le plus ordinaire, on pourrait dire normal, quand on pousse l'hémorragie aussi loin que possible, en ouvrant, s'il le faut, plusieurs vaisseaux.

On peut donc prendre les grandes convulsions comme criterium des recherches sur l'utilité de la transfusion dans les hémorragies.

Cela posé, examinons à l'aide des expériences de nos prédécesseurs la réponse qui pourrait être faite à la question telle que nous venons de la définir.

1.

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